Technique : Photographier le sanglier

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Nez à nez avec le sanglier

Avec le chevreuil, le sanglier est certainement le grand mammifère sauvage le plus commun en Europe occidentale, et peut-être également le plus chassé. De fait, il demeure fort méfiant envers l’humain (devenu son principal prédateur après l’éradication des loups et des ours) : le photographier en milieu naturel nécessite donc quelques connaissances, mais reste au final relativement abordable, si tant est que le milieu permette la prise de vue.

Connaître l’animal, ses habitudes, ses points forts et ses faiblesses vous aideront dans votre quête de photos : voici quelques conseils qui je l’espère, contribueront à la mener à son terme !

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Article mis à jour le 11/12/2022

Le sanglier en bref

Le sanglier (Sus scrofa) est un animal massif mais discret qu’il est souvent difficile d’observer en journée du fait de ses mœurs essentiellement nocturnes. Pouvant dépasser allègrement les 150 kg, les grands mâles sont généralement solitaires en dehors des périodes de rut hivernales, tandis que les jeunes et les femelles vivent en groupe appelés « compagnies », et menés par une laie (femelle adulte).

Photographier le sanglier
Gros mâle solitaire, quelques instants après un combat avec un autre sanglier


Les jeunes sangliers sont appelés marcassins, et arborent un pelage rayé, leur permettant de se fondre aisément dans leur milieu. En grandissant, leur fourrure arbore des couleurs rousses, les « ados » sont alors nommés bêtes rousses (tous ne prennent cependant pas cette couleur particulière).

Marcassin en recherche de nourriture
Jeune sanglier appelé "bête rousse"



En pleine expansion en Europe, le sanglier profite de l’abondance de nourriture à la fois offerte par l’agriculture omniprésente dans son milieu mais aussi par l’agrainage massif des associations de chasse, qui ne lésinent jamais sur les moyens pour maintenir les populations sur leurs territoires de jeu… Trouvant de fait continuellement de quoi se nourrir, les laies sont à même de porter plusieurs fois dans l’année, contribuant ainsi à la prolifération de l’espèce et des conséquences qui en résultent (destruction des cultures et des milieux…)

Marcassins sur leur mère

Cela n’en fait pas pour autant un animal facile à observer et qui plus est à photographie, le sanglier ayant une farouche aversion de la présence humaine : l’homme est depuis des décennies son seul prédateur, et il le sait ! Il est donc nécessaire de procéder à un repérage préalable pour augmenter ses chances de le rencontrer, d’autant qu’il peut parcourir jusqu’à 30 km en une nuit. Fort heureusement, si le territoire originel du sanglier est vaste, son accoutumance à l’agrainage permet de le contraindre à des territoires limités, augmentant les probabilités de le croiser.

Laie meneuse de compagnie (photo non recadrée !)
Laie meneuse de compagnie (Canon EOS 20D + 500/4.5)

Physiologie du sanglier

Le sanglier se distingue par une morphologie robuste, des défenses développées chez le mâle et un pelage qui varie selon l’âge et la saison. La période de reproduction, de novembre à janvier, aboutit à des portées de 4 à 7 marcassins après une gestation de 115 jours, soulignant une reproduction efficace et une structure sociale matriarcale. Omnivore, il se nourrit d’une grande variété d’aliments, ce qui lui permet de s’adapter à différents écosystèmes.

Le sanglier fréquente une large gamme d’habitats, mais montre une prédilection pour les zones boisées où il peut trouver abri et nourriture. Omnivore, il adapte son alimentation aux ressources disponibles, jouant un rôle essentiel dans l’écosystème par son action de fouilleur. Bien que l’espèce ne soit pas migratrice, elle peut parcourir de grandes distances à la recherche de nourriture ou d’un habitat convenable (ce qui peut parfois engendrer des dégâts sur les cultures).

Les sangliers ont un comportement social varié, avec des mâles solitaires et des groupes matriarcaux composés de femelles et de leur progéniture. Les indices de leur présence, tels que les boutis, frottis, souilles, et empreintes, sont caractéristiques et témoignent de leur activité au sein de leurs territoires.

CaractéristiqueDescription
Taille (moyenne) Mâles : 105-170 cm + queue 17-30 cm
Femelles : 100-146 cm + queue 16-28 cm
Hauteur au garrot : ± 90cm
PoidsMâles : 100-130 kg
Femelles : 30-80 kg
DiagnoseSilhouette trapue, tête massive, oreilles arrondies, pelage variant du roux au noir
DéterminationSimple
Période d’observationToute l’année, principalement nocturne

Repérer le sanglier

Les meilleures traces de présence du sanglier sont ce que l’on appelle les boutis, creusements effectués à coup de boutoir (groin) et de défenses par le sanglier dans le sol. Il n’est pas rare, aux abords des massifs forestiers peuplés de sangliers, de voir ces bandes enherbées littéralement retournées, signe de présence incontestable de ce mammifère.

Sanglier en train de fouiller le sol à la recherche de nourriture
Sanglier en train de fouiller le sol à la recherche de nourriture

Le sanglier semble jouer un rôle important dans l’écosystème qu’il fréquente, en aérant et retournant les sols forestiers en recherchant tubercules et champignons, dont il transporte ensuite inconsciemment les spores mais aussi nombre de graines enfouies dans le sol parfois depuis des années, et qui ont conservé leurs propriété germinatives.

Ces graines et spores, entourées de boue et chauffées au contact de l’animal, voient leurs chances de germer considérablement augmentées ce qui contribue à la diversité végétale de l’écosystème.

Les empreintes de sanglier, très caractéristiques, signent aussi la présence de ce mammifère : le pied, très large, ne peut se confondre qu’avec celui du cerf dans l’éventualité où les gardes (ongles saillants des deux doigts situés à l’arrière de la patte) ne sont pas imprimées au sol.

Empreinte de sanglier - une forme caractéristique
Empreintes de sanglier
Empreinte de sanglier dans la boue

C’est notamment près des points d’eau en forêt que l’on a le plus de chance de trouver des traces de passage de sanglier, ce dernier ayant un besoin récurrent de se souiller de boue pour éliminer les parasites de son poil (il peut être intéressant de dresser un affût aux abords d’une souille régulièrement fréquentée…)

Souille fréquentée par des sangliers

Autre signe de présence : les frottis que l’on peut observer sur les gros troncs d’arbres, généralement aux alentours immédiat des souilles : le sanglier se frotte aux arbres afin d’éliminer le surplus de boue sur son poil et de marquer son territoire, évacuant par la même occasion parasites et insectes y ayant élu domicile.

Frottis de sanglier sur un tronc d'arbre

Ouïe et odorat du sanglier


Les oreilles du sanglier, appelées « écoutes », témoignent d’une grande capacité à déceler le moindre bruit suspect malgré qu’il ne puisse, comme nombre d’autres mammifères, les orienter à loisir : c’est pour cette raison qu’il tourne sur lui-même dans votre direction quand il vous a repéré ! Toutefois, on mettra à profit le fait que le sanglier est un animal bruyant quand il vit en communauté et lorsqu’il se nourrit : grognements, bruits de pas, soufflements couvriront généralement votre approche. Il est de fait bien plus difficile d’approcher un mâle solitaire, qui lui saura malgré sa grande corpulence, progresser sans bruit si un danger survient.

Moyennant une grande discrétion, on peut approcher les sangliers très, très près !

L’odorat du sanglier demeure sa plus grande force : extrêmement développé, il surpasse celui du chien et joue un rôle prépondérant dans sa vie sociale. Il fuira d’ailleurs souvent face au vent afin de maximiser ses chances de ne pas se jeter dans les griffes d’un potentiel prédateur.

Sanglier recherchant une odeur, en direction du photographe
Sanglier recherchant une odeur, en direction du photographe


De fait, l’approche du sanglier se fera essentiellement sur deux aspects : le sens du vent et le bruit, et c’est donc souvent de côté, perpendiculairement à la direction prise par la brise, que la progression se fera vers l’animal : ceci vous évitera de devoir sans cesse avancer pour le suivre, face au vent, et couvrira le bruit de vos déplacements !

Quel camouflage ?


La vision du sanglier est assez mauvaise : on pourrait l’apparenter à une forte myopie avec une insensibilité au rouge et l’absence de vision stéréoscopique. Si ses yeux sont appelés « mirettes », il détecte néanmoins assez bien le mouvement notamment à courte distance.

Tombée nez à nez avec le photographe, cette laie s'est figée, essayant de détecter le moindre mouvement

Le camouflage doit être intégral, couvrant les mains et le visage afin d’éviter tout contraste voyant. Il n’est pas nécessaire d’opter pour du camo 3D mais les motifs réalistes aideront à masquer votre présence à proximité immédiate des animaux.

Photographe à l'oeuvre, en pleine approche de sangliers

Attention : des motifs « trop » réalistes (dits « à haute fréquence ») occasionnent à distance longue ou moyenne, un effet « tâche sombre » que les sangliers ne manqueront pas de déceler !

Il est donc généralement préférable de les éviter si vous devez faire de l’approche plus ou moins à découvert, et d’opter pour du camo à larges motifs, du type « Predator » par exemple.

Prise de vue

Une fois la présence du sanglier avérée, on choisira généralement le matin au lever du jour ou le soir pour ses sorties photographiques. Le sanglier, animal aux mœurs nocturnes, continue néanmoins ses activités en journée quand il n’est pas dérangé.

En cas de manque de lumière, tentez les filés !
En cas de manque de lumière, tentez les filés sur les sangliers en mouvement (ici au 1/30ème)


L’hiver sera contre toute attente une période propice pour son approche car en période de chasse, ce dernier évitera les zones de battue : si vous en avez la possibilité, étudiez les zones chassées des forêts domaniales afin de cibler là où vous pourrez passer du temps en compagnie des sangliers sans déranger ni être dérangé par les chasseurs. De plus, l’absence de feuilles sur les arbres vous permettra d’obtenir une lumière un peu plus présente en sous-bois.

L'absence de feuilles sur les arbres peut donner de belles lumières les matins d'hiver
L’absence de feuilles sur les arbres peut donner de belles lumières les matins d’hiver


Le camouflage olfactif sera de loin le plus important, il faudra donc veiller à constamment surveiller le sens du vent, aucune tenue ni astuce ne permettant de masquer votre odeur au sanglier. Votre progression devra donc se faire en conséquence, tout en avançant dans la mesure du possible en silence.

À bon vent, le photographe profitera du bruit fait par les sangliers pour réaliser son approche
À bon vent, le photographe profitera du bruit fait par les sangliers pour réaliser son approche

Le fait d’avancer face au vent permet de sentir le sanglier avant de le voir : si l’odorat humain est bien moins développé que celui des animaux, l’odeur dégagée par les sangliers, très forte, est caractéristique et permet de le repérer à distance !

Sangliers en sous-bois, à l'approche

Tout comme pour les autres animaux, vous devrez évidemment mettre à profit l’environnement pour casser votre forme humaine et éviter de bouger. On préfèrera l’approche plutôt que l’affût, du simple fait que le sanglier ne reste que rarement au même endroit bien longtemps. Il sera néanmoins possible de se poster à proximité d’une souille (petite mare de boue et d’eau) si le passage des sangliers y est régulier.

Au niveau du matériel photo, l’usage du téléobjectif lumineux avec une ouverture de f/4.0 voire f/2.8 est indispensable : outre le fait de devoir réaliser les photographies en sous-bois, vous devrez également faire votre mise au point sur des animaux dont le pelage est foncé ! L’usage d’un monopode facilitera la progression et vous permettra, en vous appuyant contre des arbres ou des branches, de bénéficier d’une stabilité équivalente à celle d’un trépied sans en avoir les inconvénients.

Contrairement au chevreuil qui est curieux, le sanglier fuit irrémédiablement en cas de suspicion : vous n’aurez donc pas droit à l’erreur ! Néanmoins, il peut vous accorder le bénéfice du doute s’il ne s’agit que d’un craquement de branches : dans ce cas, immobilisez-vous et ne répondez pas aux gestuelles qu’il profèrera en votre direction avec son groin même s’il s’avère menaçant : il s’agira essentiellement d’essayer de vous sentir !

Au travers des branches...
Au travers des branches… Entendu, mais pas senti !

En résumé

Vous trouverez le sanglier dans à peu près toutes les régions de France et plus généralement d’Europe occidentale, offrant des massifs boisés denses en végétation et des points d’eau. On le retrouvera également dans le maquis, et parfois même dans les roselières.

Ses principaux signes de présence sont les boutis, les empreintes caractéristiques qu’il laissera au sol, et bien entendu les souilles et leurs alentours immédiats, généralement marqués de boue.

L’idéal pour l’observer et le photographier reste le lever du jour, même si en soirée les chances sont également importantes. Le rut hivernal (décembre) rend son observation plus aisée, du fait des comportements souvent bruyants entre mâles, qui couvriront votre progression. Le sanglier est extrêmement sensible à l’odeur et au bruit, mais ne dispose pas d’une bonne vision : il détecte à contrario très bien le mouvement à courte distance.

Sanglier
Sanglier en sous-bois

L’approche se fera perpendiculairement au sens du vent, ou à défaut face au vent. Les affûts sont possibles à proximité des souilles. Au niveau matériel : un 300mm semble être le minimum, privilégiez toutefois la luminosité de l’optique à la focale (on préfèrera un bon 300/4 à mauvais zoom 500mm !)

Enfin, le camouflage devra être intégral sans pour autant nécessiter les grands moyens : une simple tenue neutre peut faire l’affaire, tout est question de contraste avec l’environnement !

HabitatMassifs boisés denses en végétation, maquis, parfois roselières
Signes de présenceBoutis (zones de terre retournées par les sangliers), empreintes, souilles
Pour l’observerToute l’année, de préférence tôt le matin ou en soirée. Le rut hivernal (décembre) rend l’observation un peu plus facile du fait des comportements souvent bruyants
Pour le photographierÀ l’approche ou à l’affût à proximité d’une souille, mais toujours en prenant garde au sens du vent
Téléobjectif lumineux de 300 mm ou plus
Camouflage de base (couleur neutre)
Comportements à connaîtreExtrêmement sensible à l’odeur et au bruit
Revient dans les souilles assez régulièrement

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