Les vacances sont souvent l’occasion de reprendre (sérieusement) la photographie animalière, et plus particulièrement les affûts. C’est aussi l’occasion pour moi de lancer un nouveau type de billet sur « Aube Nature », les mini-vidéos ! Je vous propose donc de commencer cette série avec une rencontre, celle d’un joli brocard lors d’un affût au crépuscule…
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C’est après plusieurs soirs à passer en voiture à proximité d’une petite clairière jouxtant un bois et des champs que je connais très bien pour les avoir arpenté de nombreuses fois, que je me suis décidé à venir affûter… Chaque soir ou presque, un ou plusieurs chevreuils venaient au gagnage sur cette étendue herbeuse, malheureusement ombragée en soirée. Mais cela constituait un joli challenge car la promiscuité des animaux serait de toute évidence assez forte !
C’est vers 20h00, après une approche des lieux laborieuse (j’ai eu l’excellente idée de longer la lisière au lieu de prendre le petit chemin passant dans le bois, beaucoup plus silencieux) que j’arrive sur place. Je devrai attendre le passage de voitures sur la départementale voisine pour pouvoir progresser à couvert des craquements de feuilles et de branches sous mes pieds. La cerise sur le gâteau sera la traversée d’un profond fossé – avec de l’eau ! – dont j’ignorais la présence à cet endroit !
Conscient du mini raffut que j’ai produit malgré toutes les précautions prises, je m’installe quand même, sagement assis en bordure de la haie séparant la clairière des champs labourés. Des ronces me piquent le dos et gênent l’installation du filet de camouflage sur mon matériel. Après quelques essais de visée, je me rends compte que qu’il me faudra directement grimper en sensibilité, et que finalement, les chevreuils viennent plus vers le centre de la clairière, à gauche : je tourne donc de 45° en cette direction.
Une fois immobile et invisible, s’ouvre alors à mes oreilles l’intimité d’une nature qui s’endort pour certains, se réveille pour d’autres. Des passereaux virevoltent à quelques centimètres au-dessus de ma tête, au point que je me demande si l’un d’eux ne viendra pas se poser sur moi comme c’est déjà arrivé ! Une épeire tisse sa toile, tandis qu’un amaryllis se pose sur une fleur en fin de vie, peut-être pour y passer la nuit.
Progressivement, mes sens se mettent en éveil, et les bruissements d’habitants des fourrés auxquels je suis accolé parviennent à mes oreilles. Un rongeur gratte dans mon dos, à quelques centimètres. Je sens une branche bouger dans mes reins ! Mais je demeure immobile, car là, devant, un autre bruit se fait entendre…
À mon grand désespoir, ce bruit tourne vers la droite, vers l’arrière ! Tournant la tête tout doucement sous mon filet, je distingue par intermittence la forme caractéristique du chevreuil qui se découpe dans les feuillages. Ce dernier mettra près de 10 minutes à sortir du bois… dans mon dos !
Conscient de la difficulté – voire de l’impossibilité – de me retourner avec mon matériel, je fais alors le choix qui s’impose dans ce cas précis : l’attente. Ce sera l’occasion pour moi de pouvoir observer durant près de 10 minutes ce très joli brocard qui se découvre à mes yeux, sursautant au moins bruit, toujours sur le qui-vive. J’en viendrai même à douter de ma discrétion, puisqu’à chaque fois c’est en ma direction que l’animal pose son regard ! Mais je comprends vite : les rongeurs s’affairant dans le buisson sont dans mon dos, et ils ne cessent de faire craquer les végétaux morts, produisant un bruit discret mais continu de feuilles séchées écrasées !
Au terme de 5 minutes supplémentaires, le chevreuil aura progressé de quelques mètres, et j’aurai réussi à tourner légèrement mon téléobjectif, centimètre par centimètre, dans sa direction : c’est le moment de vérité. Je déclenche une première fois. Et à ma grande surprise, aucune réaction ! L’animal est à moins de 20 mètres, quasiment plein cadre.
Vont commencer près de 20 minutes de ce que j’oserais appeler « complicité », tant j’ai le sentiment de m’immiscer dans l’intimité de l’animal ! Photos, vidéos, broutage, grattage, pause pipi, toilette… Tout y passe ou presque !

Canon EOS 5D mark II + Sigma 500/4.5 EX HSM, affût
f/4.5, 1/160ème, 3200 ISO
Ces instants intenses en compagnie de « mon » brocard trouveront leur fin quand, porté par une brise naissante, mon odeur dévoilera ma présence. Je pense également que l’heure passée sur place sans bouger, aura permis la diffusion progressive de mon odeur humaine, mettant un terme à ce qui constitue mes premières images pour les deux minutes de nature que je vous proposerai désormais régulièrement 😉




