La photo est-elle un loisir onéreux ?

Depuis plus de 12 ans que je fais de la photo, je n’ai cessé de me « prendre » des remarques sur le fait que c’était une passion (très) onéreuse par nombre d’amis et connaissances avec qui je discutais du matériel photographique, des logiciels, du temps passé ici ou là sur le terrain, des voyages parfois nécessaires…

Qu’en est-il réellement ? Et surtout : la photo est-elle une passion plus chère que d’autres ?

À CONSULTER ÉGALEMENT : Pour en savoir plus sur le matériel

Et les autres loisirs et passions ?

Il existe moult loisirs dont le coût équivaut ou dépasse celui de la photographie. J’aime en citer un en particulier, car il se rapproche de la photographie sur bien des points : la musique.

En effet, comme pour la photographie, la musique nécessite un lent et difficile apprentissage d’abord technique (combien d’heures de solfège et de gammes pour commencer à maîtriser un instrument ?…), demande une once de talent naturel pour dépasser le niveau du commun des pratiquants, nécessite de très longues heures d’exercice pour acquérir de nouvelles « compétences » ou préserver ses acquis, et bien souvent, implique l’achat d’onéreux matériels pour son exercice !

Il suffit d’aller voir le prix des instruments de musique chez Music Privilege, l’une des plus abordables du web francophone, pour se rendre compte du coût du moindre instrument de moyenne ou haut de gamme. S’ajoutent à cela tout l’attirail indispensable à côté (pour les instruments transportables, housses et bagagerie spécialisée, produits et accessoires d’entretien, partitions, mais également – comme pour la photographie – tout ce qu’il faut pour enregistrer, manipuler et sauvegarder les créations issues de sa pratique instrumentale !

L'imposant cache de la lentille frontale du Sigma 120-300/2.8 OS

Le principal point commun de la musique avec la photo demeure à mon sens, au delà de l’aspect matériel, le temps passé dans sa pratique, et le partage avec autrui autour de cette passion. On pourra rajouter que si beaucoup de musiciens amateurs sont très talentueux (comme nombre de photographes amateurs), bien peu arrivent à vivre de leur passion 😉

Alors, la photo : combien ça coûte ?

Une question aussi précise que « combien coûte une voiture » ! Car on peut acheter une petite citadine d’entrée de gamme d’occasion, comme on peut préférer une puissante routière de luxe intégralement équipée, et achetée neuve !

On peut néanmoins donner les grandes lignes de ce que peut coûter un équipement « moyen », du niveau des photographes professionnels les moins bien équipés dira-t-on (nb : je ne donne évidemment pas les prix exacts, ce sont des approximations car tout dépend d’abord de la marque de votre matériel !) :

  • Un boîtier milieu de gamme : 3000 €
  • Un télézoom transtandard : 1500 €
  • Un télézoom moyenne focale type 70-200 : 2000 €
  • Une optique fixe portrait : 1000 €
  • Une optique ultra grand angle : 1500 €

On en est déjà à… 9000 € (!) Bien entendu, si vous faites de la photo sportive ou de l’animalier, les tarifs s’envolent (une longue focale lumineuse se monnaye 4500 € en occasion… Et souvent +10000€ en neuf !)
Ajoutons à cela :

  • Des sacs photo pour différents usages
  • Un ou plusieurs trépieds, monopodes, rotules
  • De quoi stocker vos photos (cartes mémoires)
  • Un ordinateur et de l’espace de stockage
  • Des logiciels spécialisés
  • Des accessoires liés à votre spécialisation (matériel de studio, camouflage, etc.)
  • etc.

Au final on dépasse allègrement les 10 000 €, même en optant (comme je l’ai souvent fait) pour des matériels soit d’occasion, soit de marques génériques (Sigma, Tamron…) moins onéreux, parfois aussi qualitatifs (je parle du résultat final sur écran ou papier) bien que certainement moins bien construits… Tout ceci étant lié d’abord à la spécialité du photographe, et à son degré d’exigence (le budget matériel d’un photographe animalier bien équipé dépasse très certainement les 20000 € !)

Une fois ces petits calculs effectués, on peut logiquement se dire : OUI, la photo est un loisir très onéreux ! Mais voilà… Allez je vais vous citer quelques passions (que je n’ai personnellement pas) :

  • la moto
  • la pêche
  • la musique dont j’ai parlé préalablement
  • les collectionneurs de montres
  • la course automobile
  • le cyclisme (à partir d’un certain niveau s’entend)
  • les jeux vidéos
  • etc.

Je connais AU MOINS une personne pour chacune de ces « spécialités » qui dépense BEAUCOUP PLUS que moi je ne le fais pour la photo 🙂

Mais je trouve à la photographie une chose absolument essentielle, que les autres passions ne peuvent avoir que très difficilement !

La photo, un loisir qui peut rapporter !

Lorsque j’ai débuté la photo, aux prémisses de l’ère numérique, les reflex étaient effectivement inaccessibles (le premier prix devait être de l’ordre de 3500 €… sans objectifs, et avec des caractéristiques qui feraient rire beaucoup d’entre nous aujourd’hui 🙂 ) ; mon choix s’était porté à l’époque sur un petit compact numérique 3.2 MPixels, tout automatique avec seulement 2 modes « créatifs », et une lenteur abominable ne le rendant utilisable que sur du paysage ou du portrait « posé » !

À cet époque, un tel appareil photo numérique m’avait coûté… 340 € (!) ; début 2004, lorsque j’ai pu enfin investir un peu d’argent dans mon premier reflex (qui était le célèbre Canon EOS 300D, le premier réflex numérique « abordable », c’est-à-dire en kit à moins de 1500 € !) je disposais d’un budget global de 2000 € environ, ce qui m’avait permis, donc, d’investir dans ce boîtier Canon (6 MPixels, 2.5 images/secondes… Oui oui !) et dans 3 optiques pas franchement haut de gamme de chez Sigma, dont une en occasion ! J’avais également pu investir dans un petit sac photo et une carte mémoire (512 Mo à ce moment, ce qui était déjà très bien)

C’est donc avec cet attirail, et quelques accessoires adaptés à ma passion naissante pour la photographie animalière, que je me suis lancé. Je dois avouer aujourd’hui que sans deux événements « majeurs » (à savoir un prix au Festival de Montier-en-Der, qui me rapporta une rondelette somme d’argent, et un contrat totalement inespéré avec ma première agence photo début 2005) je n’aurais très certainement jamais réinvesti dans la photographie…

Car depuis mars 2005, je n’ai JAMAIS repris un centime de mon salaire pour financer cette passion incroyable qui a changé ma vie ! J’ai eu l’immense chance, et le bonheur de pouvoir auto-financer chaque investissement alors réalisé 🙂

Info

Lorsque je parle d’agence photo, je parle d’une vraie agence, qui rémunère ses photographes à la juste valeur des usages faits de leurs photos.

N’espérez pas gagner de l’argent avec vos clichés sur un microstock : ces banques d’images qui bradent les photos à quelques centimes en vous faisant miroiter la Lune ne font gagner de l’argent qu’à elles-mêmes !

Vous allez me dire : « Mais pourquoi raconte-t-il tout ça ? »

La raison est simple : la photographie fait partie de ces rares loisirs / passions qui à un moment donné, pour peu que l’on s’y investisse réellement, peut s’avérer être une source de revenus complémentaires, et par ce fait s’autofinancer.

(bien entendu je mets de côté tout l’aspect réglementaire inhérent à l’exercice d’une activité professionnelle déclarée, car vous le savez : dès le premier centime gagné, vous devez déclarer vos revenus ! Je ne parle même pas d’en vivre : pour moi la photo est et restera une passion, et par ce fait, même si je pouvais en vivre demain, je ne le voudrai pas car je ne veux pas que ma passion devienne par la force des choses une contrainte, celle de gagner de l’argent impérativement !)

En bref

Je conçois que tous les photographes ne peuvent pas envisager à un moment donné de vivre de leur passion, voire même de l’autofinancer comme j’ai eu la chance de pouvoir le faire. Pour de multiples raisons :

  • le temps
  • l’envie
  • la spécialité (allez donc gagner votre vie avec la photo de rue… sauf à être très exceptionnellement bon !)
  • les compétences « transversales » nécessaires (savoir se vendre, trouver des clients, savoir gérer, etc.)
  • le talent (mode modestie « on » !)

Mais cependant, la photographie demeure l’un des rares loisirs qui puisse rapporter (un peu) d’argent à ses pratiquants, si tant est qu’ils s’y investissent à un moment donné. Et ça, c’est une chose rarement rencontrée dans les autres disciplines de loisir dont le budget peut être comparé à la photographie. Même si ce budget reste bien trop souvent, beaucoup trop élevé pour le commun des mortels !

2 réflexions sur “La photo est-elle un loisir onéreux ?”

  1. Avatar de Raf
    Raf

    Salut Cédric,
    J’ai envie de dire qu’en matière de photographie, ce sont les pluridisciplinaires qui payent chère ! Les portraitistes, les photographes de rue, les férus de proxi photo peuvent s’en titrer pour un budget avoisinant les 1000 à 1500 euros. Les paysagistes doivent ajouter le coût d’un trépied. Au final ce sont effectivement les photographes animaliers et sportifs qui doivent investir dans de longues focales qui ouvrent, qui pèsent et qui encombrent (sauf le portefeuille qui est délesté…). Mais pratiquer tout type de photo en faisant le choix de la qualité à défaut de la polyvalence en matière de matériel, cela coûte fort cher.
    Étant un peu musicien, je te rejoins sur le fait que la musique est chronophage (bien davantage en apprentissage à mon sens) et les instruments peuvent coûter horriblement cher si l’on fait abstraction des flutes et autres pipeaux… Un piano ne se transporte pas ! Une contre-basse ou un violon selle demandent un véhicule motorisé pour le transport ; un jeu de cordes de qualité n’est pas donné non plus, etc.

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  2. Avatar de JCG974
    JCG974

    Bonjour Cédric,
    Je ne peux résister au désir de commenter cet article, car c’est un sujet récurrent qui est presque toujours et rapidement abordé dès que l’on parle « photo » avec un non photographe.
    On m’a bien demandé mille fois « Combien il coûte ton appareil ? », (ton objectif, ton flash, etc…). En général, la phrase suivante consiste à s’appesantir en hochant la tête, oh là là, à quel point c’est cher, et, sous-entendu, il faut être soit très riche, soit un peu félé, soit réellement très très passionné, comprendre anormal, (voir les trois ou un combinaison des trois) pour acheter du matériel à ce prix là et investir autant d’argent dans ce qui n’est somme toute qu’un simple hobby que votre interlocuteur fait aussi bien avec son smartphone.
    En général je réponds que si j’avais une voiture à 30 000 euros, personne ne penserait à faire ce genre de remarque tellement ce serait banal. Et si mon choix consiste à rouler dans un véhicule de 1992 et de dépenser mes sous dans du matériel photo, je ne vois pas pourquoi cela devrait soulever des remarques.
    Quand cela vient en plus d’un fumeur qui transforme 10 euros par jour (soit presque 4000 euros par an) en fumée, cela me fait doucement rigoler.
    Entendons-nous bien, chacun dépense ses sous comme il l’entend et comme ça lui fait plaisir, mais de grâce arrêtez de me les briser menu parce que mon 70/200 f2,8 ou mon 300 f4 est un peu plus gros que la moyenne des objectifs grand public.
    Oui la photo coûte cher, mais surtout au début en fait, car une fois le matériel acheté, on peut mitrailler à volonté pour 0 ! Ce qui n’est pas le cas de beaucoup de loisirs. Autrefois l’achat des films, les développements et tirages coûtaient un bras pour les petits budgets et étaient un frein à faire beaucoup d’images, ce qui n’est plus le cas.
    Donc, voilà, ce petit billet d’humeur pour dire à tous ceux qui demandent « combien ça coûte ? » de plutôt comprendre « combien ça fait du bien » quand on ramène chez soi un cliché qui nous rend heureux. Et le bonheur n’a pas de prix !
    ps: et 100% d’accord avec Raf, entre autre sur le fait que l’apprentissage et la maîtrise d’un instrument de musique est autrement plus long et exigeant : « une vie de suffit pas » comme me dit mon prof de sax 😉

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