La prise de vue en contre-jour est un exercice difficile et ne donnant pas toujours les résultats escomptés : sujets peu détaillés, lumières dures… Mais il est possible d’utiliser à bon escient cette situation en vue d’obtenir des images plus créatives, et de retourner le problème afin de travailler avec les silhouettes des végétaux, animaux ou paysages : explications.
Une histoire de contraste
À CONSULTER ÉGALEMENT : Pour en savoir plus sur la technique photo…
L’exploitation des conditions difficiles que sont les contre-jours permet d’obtenir des images que l’oeil ne peut souvent pas « construire » et amener à notre cerveau, du simple fait qu’il constitue à ce jour un système optique qu’aucun capteur numérique ne peut égaler en matière de dynamique et d’adaptativité à la lumière ! Du coup, les défauts de nos capteurs numériques vont, grâce à l’amplification (voulue et maîtrisée !) des contrastes entre hautes et basses lumières, jouer en votre faveur et amener la petite touche de créativité à nos images 🙂

L’exposition a été faite sur le tournesol, et j’ai profité de l’arrière-plan
(une colline à l’ombre) pour obtenir un fond noirci !
EOS 5D + Sigma 500/4.5 EX HSM,
f/5.6, 1/1000ème, 500 ISO
L’explication principale de la différence de traitement entre l’oeil et le capteur tient au fait que l’oeil interprète la luminance de manière logarithmique, tandis que le capteur numérique, lui, « mesure » simplement la quantité de photons perçue dans chacun de ses photosites : au final, dans les basses lumières, la quantité d’informations est beaucoup plus faible que dans les hautes lumières (basse lumière = peu de photons, haute lumière = énormément de photons !)
On applique alors à l’échelle de luminance mesurée une courbe de transfert logarithmique, afin de ramener les mesures au plus près de celles que l’oeil réalise.
On parle souvent de gris neutre 18% : cette valeur est simplement mesurée sur l’échelle logarithmique de la luminance, et correspond au gris moyen exactement situé entre le blanc et le noir… sur l’échelle linéaire (gris à 50% !)
L’idée va être de profiter en réalité de la faiblesse de nos capteurs, pour produire des images créatives, où hautes et basses lumières s’opposent de manière originale ou harmonieuse !
La base : la maîtrise de l’exposition
La prise de vue en contre-jour étant basée comme nous l’avons vu sur des histoires de contraste, le principe d’exposition pour obtenir des ombres chinoises est finalement assez simple : il suffit d’exposer pour les hautes lumières !
En effet, la mesure de lumière faite sur les zones les plus lumineuses de notre scène va engendrer, du fait de la dynamique (très) étriquée comparée à celle de nos yeux, un tassement drastique de l’information dans les basses lumières.
En d’autres termes, nous allons chercher – contrairement à ce que l’on voudrait par exemple faire lors d’une prise de vue dans une église pour mettre en valeur son architecture – à assombrir sciemment les ombres de manière à obtenir nos silhouettes découpées sur la lumière.
D’un point de vue pratique, le mode Spot va être notre ami : il permet en effet de mesurer la lumière sur un point précis (ou presque, avec 2 à 3% de la surface de l’image selon les appareils) et de ce fait autorise tous les écarts imaginables entre hautes et basses lumières sur les scène fort contrastées !

l’oiseau, le trop fort contraste a assombri le reste !
EOS 5D + Sigma 500/4.5 EX HSM,
f/5.6, 1/1000ème, 100 ISO
Personnellement je l’utilise assez peu, préférant utiliser une mesure centrale pondérée en jouant sur la correction d’exposition (chacun ses mauvaises habitudes !!!)
Composer avec les formes
L’un des principaux usages créatifs en matière de contre-jour va être de jouer avec les ombres, et donc les formes. Une manière de dessiner les contours des sujets photographiés, pouvant amener à de belles captures d’images qui n’auraient certainement pas la même teneur s’il n’y avait la présence du contre-jour.
Marié à des vitesses lentes sur des sujets en mouvement, on peut également obtenir des scènes sympathiques alliant mouvement et immobilité, parfaitement mis en valeur par le contraste général de la scène.

EOS 5D + Sigma 500/4.5 EX HSM + TC x1.4
f/8.0, 1/100ème, 400 ISO
On pourra également jouer sur la répétitivité d’un motif et accentuer les contours pour obtenir des images très graphiques : bien utile sur les végétaux !!!

Une sous-exposition et un contraste poussé en post-traitement donne un rendu très intéressant !
EOS 5D + Sigma 500/4.5 EX HSM,
f/5.6, 1/500ème, 200 ISO avec -0.6 IL en correction d’exposition
La géométrie sera notre troisième allié dans notre recherche photographique : un moyen simple d’obtenir des images sortant (un peu) de l’ordinaire, à l’image de cette grande aigrette dont le cou se recoupe avec un roseau 🙂

EOS 5D Mark II + Sigma 500/4.5 EX HSM,
f/5.6, 1/1600ème, 500 ISO
Composer avec le contraste et les couleurs
Si la forme joue un grand rôle dans la photographie, le fond – tout ce qui touche à la colorimétrie et au contraste – peut également apporter de l’eau à notre moulin à créer des images !
Il faut souligner que bien souvent c’est au post-traitement que se fera le gros du rendu final (en tout cas pour celles et ceux qui utilisent le format RAW, soit une majorité ! Non ?…).
Tant qu’une image réalisée en post-traitement reste possible à réaliser moyennant des réglages boîtier directs que l’on a pas forcément pris le temps de faire, cela ne s’assimile pour moi pas à de la « triche ».
Le post-traitement est fait pour ça, et existait bien avant le numérique !
Le contraste est notre première arme : il permet d’amplifier encore plus les différentes entre hautes et basses lumières, et finement marié avec une balance des blancs légèrement « poussée », offre de nouvelles perspectives dans le rendu des images.
Mes premiers essais furent réalisés sur des images réalisées en fin de journée sur des écureuils en contre-jour. Les premières images, bien exposées sur les petits mammifères, ont été… supprimées ! En effet, leur fadeur et le côté brouillon des branchages ne rendait en rien la scène que j’avais sous les yeux.
C’est finalement en « pensant » ce que je pourrais faire de mes prises de vues, que j’ai finalement opté pour cette solution :

EOS 5D + Sigma 500/4.5 EX HSM,
f/5.6, 1/4000ème, 500 ISO, -0.3 IL en correction d’exposition
D’une image ratée si nous avions utilisé une exposition et un post-traitement normaux, on passe à une image finalement « voulue », qui souligne efficacement la présence d’un intrus dans les hautes branches des arbres !
Notre seconde arme sera la désormais célèbre balance des blancs, notion apparue avec le numérique et entrée dans les moeurs des photographes utilisant cette technologie. Comme vous le savez, la balance des blancs permet de moduler la température de couleurs, du froid (bleu) au chaud (orange/rouge).
Il est donc parfaitement possible, lorsque l’on pousse aux extrêmes son curseur, de modifier radicalement les images produites !
Je donnerai deux exemples simples. Le premier concerne l’un de mes oiseaux fétiches, la fameuse huppe fasciée (Upupa epops) qui agrémente outre mon avatar habituel, la couverture de mon premier livre sur la photographie animalièr.
Je ne vous resservirai pas ladite photo, mais un cliché d’ambiance réalisé en 2010 et où j’ai sciemment joué sur la balance des blancs pour modifier le rendu de l’image originelle !

EOS 5D mark II + 300/4 L IS USM,
f/4.0, 1/8000ème, 1600 ISO
D’une photo réalisée en fin d’après-midi, on passe à une image qui semble réalisée au coucher du soleil (nb : l’exposition n’a pas été retouchée puisqu’elle avait été sous-évaluée par l’appareil, trompé par le ciel laiteux…)
Le second exemple, moins extrême dans le traitement, mais au final tout aussi impressionnant, concerne une image réalisée au crépuscule dans le célèbre parc aux oiseaux de Villars-les-Dombes. La balance des blancs, légèrement poussée vers le bleu (froid), a permis d’obtenir un résultat très intéressant, bien que réalisé dans des conditions extrêmes de prise de vue (il faisait quasiment nuit !)

EOS 5D mark II + Sigma 120-300/2.8 EX HSM OS,
f/3.2, 1/20ème, 3200 ISO, -1 IL en correction d’exposition
Il est donc possible, sans aller dans les extrêmes du post-traitement et toujours sur des opérations globales portées sur les images, d’obtenir des effets sympathiques destinés à augmenter le côté créatif des photographies en contre-jour.
Conclusion
Tout ceci n’est qu’une petite brèche dans l’étendue des possibilités offertes par l’usage du contre-jour en matière de photographie de nature. J’affectionne pour ma part énormément cette technique, et en ai même fait parfois ma « marque de fabrique » sur certaines images 😉

EOS 5D + Sigma 150/2.8 EX HSM Macro,
f/5.0, 1/2000ème, 200 ISO
La créativité en photographie se résume à mes yeux à un seul mot : OSER !
Slt,
très sympa ton article,
des idées me traverse l’esprit à sa lecture.
coup de cœur pour cette Cigogne blanche au crépuscule, mais tu le savais déjà !
Cris
Des histoires de… batraciens ?
^_^
Un sacré bon article avec des illustrations splendides 🙂
C’est fou ce que vous arrivez à faire en live! Perso il me faut photoshop pour arriver à ce résultat.
Superbes images ! Qui ne sont pas retouchées en plus ! Encore bravo !
A première vue, ces photos semblent d’une incroyable simplicité mais en y voyant un peu plus près elle reflète l’étonnante beauté de la nature. C’est vraiment du joli travail.
Salut Cédric,
Je ne connaissais pas cette cigogne dans cette ambiance crépusculaire mystérieuse à souhait. Elle doit être récente étant donnée l’optique utilisée. Sinon, on redécouvre avec plaisir certaines images dont le bourdon et le pissenlit qui m’avaient bien interpelés à l’époque.
Au fait : Je ne regrette pas l’achat de ce Sigma 120-300mm OS ; ton article avait contribué à faire le saut. Rien de tel qu’un test terrain pour s’en faire une idée 🙂
Le pissenlit ???
Rho Raf 😀 tu dois être fatigué ce soir (ou alors chez toi les pissenlits sont énormes !)
Quant au 120-300 OS : un « must have » à mon sens !
Bon article, et les photos d’illustration sont à la hauteur du sujet ! Ma préférence va à l’aigrette, pour son côté studio. Et pourtant, je ne suis pas fan de ce genre de photo habituellement…
Je suis aussi un adepte du contre-jour, et je pense qu’il permet souvent de sortir des photos originales. Surtout le matin, ou après la pluie, pour les gouttes d’eau bien sûr !
Bonne soirée et à bientôt.
PS : et merci de montrer une fois de plus qu’il vaut mieux penser une photo à la prise de vue que sur Photoshop !
Bravo pour ces belles mises en valeur de la nature ! C’est magnifique. J’aurais besoin de prendre des cours ;-p
Excellent article et très belle photo! Hâte de lire les prochains articles de la Boîte à Photo!
Ces photos sont magnifiques c’est dingue ce que l’on peu faire avec un contraste ajusté !
Merci pour ce partage 🙂
Bonjour, merci beaucoup pour tous ces conseils photo qui, je le sens, vont vitre être très utiles ! Bonne continuation !
Merci Pour cet article.
J’affectionne tout particulièrement les contre-jour.
Mais jusqu’à maintenant mes quelques réussites sont plus dus au hasard et de multiples essais qu’à une maîtrise de cette technique.
A bientôt.
La prise en contre-jour est très délicate, c’est du tout au rien! Il m’est déjà arrivé de faire des prises pendant la journée entière et de n’être satisfait d’aucune d’elle. Peut-être qu’avec vos conseils j’y parviendrait plus simplement la prochaine fois.
Vraiment superbe la dernière photo !
Je démarre dans la photographie avec un Nikon D7000 (je n’ai pas osé investir plus 🙂 et la lecture de ce blog m’apporte beaucoup. Merci pour ces conseils !
Je commence sur un Nikon D5000, j’ai acheter un bouquin, mais c’est assez complexe et cela ne remplace pas ces tutaux ! alors merci !
La photo de la cigogne est juste magnifique! J’arrive pas imaginer un instant réussir un jour à faire des photos de cette qualité!
Chapeau pour la dernière photo car contre jour + macro c’est pas facile du tout!
Bonjour , je trouve que votre article est super et que les photos sont magnifiques .
Super la photo de cigogne, merci pour cette article, je trouve les photos très jolies
Bel article ; il est vrai que le contre-jour donne un rendu original et différent des photographies classiques.
Bonjour, j’ai lu cet article avec beaucoup d’attention et me suis émerveillée avec les photos en contre-jour. Par contre, avec moults essais, j’ai énormément de peine à faire la mesure au bon endroit.
Ainsi, serait-il possible de m’expliquer concrètement comment (avec mes ptites mains sur l’appareil) procéder? Appuyer à mi-course sur le ciel et refaire la mise au point sur le sujet? Mon appareil fait les deux en même temps… donc si je bloque l’expo sur le ciel, cela fera la mise au point sur le ciel… et ne pourrai donc pas remodifier l’expo…
Enfin.. .ce n’est peut-être pas clair, mais si quelqu’un pouvait m’éclairer, cela m’aiderait beaucoup! Notamment car j’aimerais utiliser cette technique lors de mariages, mais n’y parviens pas comme je l’aimerais!
merci d’avance (je travaille sur D7000)
Sophie
Bonjour
Alors sur Nikon je ne sais pas, mais en principe vous devez utiliser la mémorisation d’exposition (il doit y avoir une touche pour cela)
Sur Canon, je préfère pour ma part désolidariser la mise au point (touche AF-On) de la mesure d’exposition (Déclencheur à mi course), ce qui permet de gérer tous les cas de figure très facilement 🙂
Bravo, très beau travail;
Je rame avec mon Canon EOS pour faire des prises moyennes en CJ
donc du talent, merci
Ok merci beaucopu! J’ai encore du travail! Et me replonger dans mon manuel d’utilisation! 😉
Voila un très belle article avec surtout de très belles images : vous avez une parfaite maîtrise de la lumière naturelle et vous savez créer des compositions originales !
Bravo
C’est magnifique!
De très belles images. Merci
Super article avec comme toujours de très belle photos.
Bon article pour qui recherche le contre-jour pour obtenir des effets intéressants. Ce que j’espérais c’est trouver des solutions pour qui « subit » un contre-jour. Dans certaines conditions, par exemple des manifestations sportives, on ne peut déplacer ni le sujet, ni le photographe non plus. Donc il arrive qu’on soit en contre-jour avec des couleurs fades, sans piqué…