Photo nature : Les facteurs de réussite

Résumer ce contenu :

Suite à de nombreuses discussions avec des amis photographes à propos des facteurs faisant la réussite d’une photo animalière, j’ai décidé d’écrire une petite série d’articles sur lesquels je vous invite à bien évidemment réagir et apporter vos remarques ou expériences. Le premier d’entre eux est tout simplement axé sur les critères de réussite d’une photo animalière : qu’est-ce qui fait qu’une photo va être réalisable, et in extenso réussie ?

Les facteurs de réussite en photo nature

Je ne parlerai ici bien évidemment que des photographies réalisées sur des sujets sauvages (la photo d’animaux domestiques, familiers ou en captivité n’ayant pas les mêmes contraintes ni même les mêmes buts en soi !)

À CONSULTER ÉGALEMENT : Pour en savoir plus sur le camouflage et les techniques d’approche

Facteurs techniques

La technique, si elle n’est pas indispensable en soi, est une nécessité en photographie animalière : elle englobe aussi bien l’aspect photographique (maîtrise du matériel employé, qualité du matériel, focale utilisée, ouverture des objectifs…) que l’aspect pratique (affût, matériels de camouflage, matériels pour le repérage…)

Le type de boîtier tout d’abord : un boîtier argentique peut apporter certains avantages (silence au déclenchement – comme les EOS RT – mais aussi et surtout, fonctionnement en conditions extrêmes puisque certains modèles sont 100% mécaniques et n’ont pas les contraintes des reflex numériques qui se mettent à ne plus fonctionner au-delà de certains critères tels que les températures extrêmement basses) ; d’un autre côté le numérique apporte d’autres avantages (changement de sensibilité à la volée, performances à haute sensibilité, « autonomie » de déclenchements permise par l’utilisation de cartes mémoires de grande capacité, etc…) ; n’ayant jamais utilisé d’argentique, il m’est personnellement inconcevable d’y passer tellement le numérique offre de souplesse 😉

Les optiques : inéluctablement, les longues focales font parti du « paysage » de la photographie animalière, et ce depuis des années. Les dernières technologies (autofocus à motorisation ultrasonique, apportant silence et rapidité ; stabilisation optique permettant de gommer les bougers du photographe, etc…) apportent un confort d’utilisation et font in finé augmenter le pourcentage de réussite de manière sensible. Mais tout celà au détriment du prix (une longue focale lumineuse et stabilisée coûte au bas mot entre 4500 € et 10000 € !). Ces optiques, mariée avec l’utilisation à haute sensibilité des boîtiers numériques récents, permettent des photographies qu’il était « autrefois » impossible à réaliser, sauf à utiliser des systèmes d’éclairage complémentaires (flashs…), par exemple pour la photographie d’animaux crépusculaires (blaireaux, grands mammifères, et photographie en sous-bois plus généralement)

Bien évidemment tout cela nécessite une maîtrise parfaite du matériel et des techniques de base de la photographie. À côté de celà viennent s’ajouter les côtés pratiques de la technique :

Les matériels de camouflage : actuellement, avec l’avènement des loisirs « verts » grand public (pêche, chasse, chasse à l’arc…) il est de plus en plus facile de trouver du matériel spécialisé pour le camouflage et à des prix de plus en plus abordables. Là où il y a quelques années, on se contentait d’habits neutres ou des surplus de l’armée, on trouve désormais des tenues camo extrêmement efficaces avec des tissus dernière génération (imperrespirants et surtout silencieux) permettant de « travailler » dans des conditions extrêmes avec un confort… fortement amélioré dira-t-on (on est encore loin de la perfection sauf à y mettre un certain prix, pour ne pas dire un prix certain !!!)

En tenue d'approche en hiver : camouflage total !
Votre serviteur en tenue d’approche en sous-bois (camouflage parfaitement adapté, tissu silencieux, chaud, imper-respirant !)

Les accessoires venant complémenter le matériel photographique se trouvent aussi désormais facilement : tentes d’affût, filets, bâches, mais aussi systèmes de déclenchement automatique (piégeage photo), etc… Qui s’ils sont encore un peu onéreux, sont désormais en vente sur les sites et magasins spécialisés (là où les « anciens » devaient tout bricoler eux-même !)

Au-delà de tout cet attirail technique, son utilisation adapté contribue fortement à la réussite de la photo visée ! Chaque technique ayant son « équipement » (tenue camo « légère » pour la billebaude, camouflage poussé pour l’affût, piégeage photo pour les animaux en vol, longues focales pour les oiseaux, objectifs macro pour les insectes, etc…)

Enfin, dernier élément : la documentation ! Outre les livres qui se trouve de plus en plus nombreux sur des sujets pointus relatifs à la nature (et la photographie), l’Internet permet d’augmenter sensiblement la vitesse d’apprentissage de la nature et de la technique proprement dite (même si rien ne vient remplacer l’expérience de terrain !).

Connaissances naturalistes

Je pense que cet élément est essentiel dans la réalisation d’une photographie animalière. Toute la technique du monde ne saura remplacer la connaissance de son sujet !

La photographie nature implique de s’approprier un certain nombre d’informations sur les sujets que l’on désire traiter :

  • les moeurs de l’animal (heures de sorties, habitudes, régularité de passage, alimentation…)
  • les facteurs de dérangement (périmètre de sécurité, acuité des sens, conséquences des dérangements sur les individus ou leur progéniture…)
  • les critères d’identification

Tout ceci de manière à maîtriser les conséquences de ses actes sur les sujets étudiés : il est en effet impensable de mettre en danger un animal (ou ses petits) pour la réalisation d’une photo ! Il faut savoir que certaines espèces d’oiseaux, en cas de dérangement au nid, abandonnent purement et simplement leur progéniture.

Qu’un jeune (chez les chevreuils par exemple) touché par un humain est de toute façon condamné car abandonné par sa mère. Qu’il est dangereux pour un batracien d’être manipulé sans s’être mouillé les mains auparavant (car sans cela on lui prélève involontairement le mucus protecteur qu’il a sur son épiderme). Etc…

Réaliser ce genre de photo à l'ultra-grand-angle nécessite une parfaite connaissance des amphibiens !
Réaliser ce genre de photo à l’ultra-grand-angle (ici à moins de 10cm de la grenouille) nécessite une parfaite connaissance des amphibiens !

Les connaissances de ses sujets passent aussi par le repérage (à la jumelle généralement, et sur carte IGN), l’étude topologique du terrain (pouvant favoriser l’approche), le sens du vent (pour les mammifères), l’orientation de la lumière aux heures potentiellement intéressantes, le suivi de la météo, voire même le chronométrage des allées-venues (cas de nourrissages au nid par exemple) de manière à pouvoir s’installer sans dérangement.

Facteur « chance »

Enfin, dernier volet à mon sens contribuant à la réussite d’une photo de nature à orientation animalière, et non des moindres : le facteur « chance » !

À celà j’assimile plusieurs choses qui sont tout simplement indispensables à la réussite d’une photographie animalière :

  • Le sujet (!)
  • L’instant (la présence du photographe est disons… indéniablement un critère de réussite ! mais faut-il déclencher au bon moment !!!)
  • La lumière

La photographie animalière est une discipline demandant un capital temps énorme : très souvent (trop souvent) un des trois éléments cités ci-dessus manque à l’appel. Que d’heures passées sur le terrain sans voir « son » sujet ! Que de photographies rendues impossibles par une lumière médiocre (il suffit parfois d’un gros nuage au mauvais moment 🙁 ) ! Que de photographies ratées car prises une fraction de seconde trop tard (ou trop tôt) ou avec des paramètres de prise de vue inadaptés à l’instant du déclenchement alors qu’ils l’auraient été 3 secondes plus tôt ou plus tard !

Photographier une loutre dans son environnement naturel durant une randonnée relève surtout de la chance !
Photographier une loutre dans son environnement naturel durant une randonnée relève principalement de la chance !

Tout ceci contribue à la frustration du photographe animalier, et nombreux sont ceux qui abandonnent. Mais nombreux sont ceux aussi qui, sachant quelle émotion, quel plaisir intense on ressent lorsqu’un cliché est réussi, remettent inlassablement le coeur à l’ouvrage !

Et c’est cela, je crois, qui fait tout le charme de la photo de nature !

Facteur humain

Petit point mais ayant son importance : la possibilité d’évolution du photographe sur le territoire de son sujet ! Si accessoire que cela puisse paraître, il faut savoir qu’en France (par exemple) toute terre appartient à quelqu’un ou quelque chose (commune, entreprise…) et est donc régie par un droit d’accès particulier.

Les possibilités d’accès aux territoires intéressants sont donc un des facteurs essentiels à la réalisation d’une photographie de nature. Bien souvent, les endroits les plus intéressants sont situés dans des parcelles privées, ou des réserves naturelles (théoriquement inaccessibles au grand public). Il est donc intéressant pour le photographe de pouvoir établir un réseau de connaissances lui permettant de s’acquitter des droits d’accès aux endroits les plus propices pour la réalisation de ses photographies ! Et par là passe une entente cordiale avec les autres usagers de la nature et avec les décideurs, quels qu’ils soient (agriculteurs, chasseurs, particuliers, associations de préservation de la nature, etc…), chose parfois rendue difficile par les antagonismes inhérents aux sujets traités (par exemple, sur les « chasses » : le renard ou le blaireau ne sont généralement pas les bienvenus !)

Inutile de préciser qu’il est (à mon avis) indispensable d’avoir l’autorisation du propriétaire avant de pénétrer dans un lieu privé 🙂

En résumé

Les facteurs clés de réussite en matière de photographie animalière sont à mon sens :

  • la technique (à hauteur de 20%) : indispensable pour certains types de sujets, mais globalement secondaire (on peut réaliser de très belles photos avec du matériel « basique » même si l’utilisation de matériel haut de gamme permet d’améliorer sensiblement son taux de réussite)
  • les connaissances de terrain (à hauteur de 50%) : la photo animalière sans approche naturaliste me semble impossible. Et je n’aime personnellement pas aborder des sujets dont j’ignore tout 😉
  • la chance (à hauteur de 30%) : cumuler présence du sujet, lumière et réussite technique à un instant donné n’est pas une chose donnée !
  • le facteur humain (négligeable ou indispensable, selon cas !)
Facteurs de réussite en photo nature

Je concluerais en disant que finalement, le facteur « chance » s’améliore lorsque les deux premiers points sont acquis : on « provoque la chance » en maîtrisant l’aspect technique (photographique et pratique) et en utilisant ses connaissance sur le sujet et l’environnement dans lequel il vit (choix de l’instant et de l’endroit) !

Ça pourrait vous intéresser !

Retour en haut