Autrefois appelée « Feira de São Martinho », l’ancestrale foire agricole de Golegà (Portugal) trouve ses origines au XVIIIème siècle, alors qu’il était primordial pour la population locale, de pouvoir commercialiser les produits issus des fertiles terres de la région.
C’est à la fin du XIXème siècle qu’apparurent les premiers éleveurs de lusitaniens, et très vite, ce qui n’était qu’une petite foire agricole devint la plus grande foire aux chevaux de la péninsule ibérique. On doit cela à la présence des plus grandes lignées de lusitanos, qui ont leurs sources à Golegà même (notamment les célèbres Veiga, les chevaux des rois).
Article mis à jour le 04/12/2022 (première édition le 22/11/2006)
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Ambiance surréaliste où, noyés dans la fumée des châtaignes grillées, cavaliers et attelages côtoient une foule toujours plus nombreuse à venir voir ou revoir un événement unique au monde : la petite ville de Golegã devient comme chaque année depuis plus de deux siècles, le théâtre d’un spectacle étonnant, celui de l’une des plus anciennes foires agricoles du pays…
Quand la fête commence
Le soleil n’est levé que depuis deux heures : dans l’immense carrière symbolisant le cœur du village, des cavaliers montent leurs chevaux déjà scintillants de sueur, travaillant le « piaffé » ou alternant galops groupés et petits trots. Devant les stands que des ouvriers finissent de monter et de peindre, les premiers visiteurs arpentent la rue pavée jouxtant le paseo, cet immense anneau de terre battue entourant la place.
On finit d’installer les rideaux et de fixer les écriteaux, et déjà, un marchand de châtaignes allume son poêle, d’un feu qui ne s’éteindra plus durant toute une semaine. Apparue au XVIIIème siècle, la foire de Golegã était destinée à promouvoir les produits agricoles de la région du Ribatejo, aux sols très fertiles. En 1883, le Marquis de Pombal demanda aux éleveurs de chevaux qu’ils y exposent leurs plus beaux reproducteurs.
Au fil des ans, le cheval Lusitanien devint le centre d’intérêt de la manifestation, qui rassemble aujourd’hui plus de 5000 étalons venus de toute la péninsule ibérique ! De l’ancestrale foire de la Saint-Martin, naquit officiellement en 1972 la Feira nacionale do cavalo, la foire nationale aux chevaux. Moins touristique, plus authentique, elle est au Portugal, ce que sont les Ferias de Séville ou de Jerez à l’Espagne.
La tradition, avant les différences sociales
Au-delà de la présence de centaines de chevaux parmi les plus beaux que compte le stud-book portugais, c’est l’occasion pour toutes et tous de s’exposer dans ses plus beaux apparats : trajes portugues de rigueur, avec pantalon sombre pour les hommes, et jupe-culotte à larges pans pour les femmes, veste impeccable, chemise à jabot presqu’amidonné, les yeux disparaissant dans l’ombre du plat chapeau noir, la longue badine de noisetier et les éperons à pince servant à guider sa monture.
Si la majorité des cavaliers apparaissent endimanchés, tous ne viennent pas du même milieu social. Rassemblés par leur commune passion du lusitanien, ils savourent aussi intensément que possible le plaisir de parader, de se saluer ou d’apostropher une connaissance dans la foule. Pour un européen non méditerranéen, passer des heures à tourner sur une piste dans le seul but de se montrer peut paraître pour le moins étrange, voire incompréhensible.
Mais c’est justement là qu’opère la magie de Golegã : le partage d’une fête, où voir et être vu sont la fierté des cavaliers chichement parés. Seule la fraîcheur de la nuit laissera transparaître quelques signes distinctifs, d’aucun se parant de son manteau au col de fourrure, dont l’origine ne trompera plus le connaisseur : peau de chèvre, de renard, de blaireau, voire de loup renseignera sur le niveau social du porteur de l’habit… Dans l’indifférence générale, tous riant et plaisantant aux terrasses des bars et restaurants improvisés à l’occasion !
La présence de nombreux «fils du vent» – les gitans du Ribatejo – achève de faire de la foire de Golegã un spectacle de tous les instants, quand la fierté de ces hommes, cavaliers par nécessité, engendre défis et courses au beau milieu de la fête ! Il n’est pas rare d’apercevoir quelque gamin pied nu fendre la foule sur un étalon monté à cru et sans étriers avec une déconcertante facilité ! Ici où là, un cavalier fait coucher son cheval sur la piste encombrée, tandis que la carrière centrale accueille son lot de spectacles : concours de dressage, match de horse ball, art équestre, animations des plus grandes écoles portugaise…
Des légendes de l’équitation
C’est aussi l’occasion de croiser d’illustres cavaliers, véritables légendes vivantes dans leur pays, à l’image du Señor Veca, qui à 81 ans parvient à faire avancer sa monture sur les genoux. D’autres, plus discrets, ne rechignent pas à partager leur passion et engager le dialogue : Francisco Cancela d’Abreu, maître d’équitation à l’école Lusitanus de Golegã (et qui fut l’un des quatre membres fondateur du renouveau de l’École Portugaise d’Art Équestre en 1979), raconte dans un français parfait son travail avec les nombreux cavaliers portugais, mais aussi étrangers qui passent par son enseignement.
Éleveurs de haute école, cavaliers de tauromachie, touristes et simples paysans se côtoient ainsi, profitant des nombreux restaurants et bars improvisés dans un garage ou une cour de maison… Au détour de chaque coin de rue s’éloignant de la place centrale, sont montés en rangs serrés les stands de vendeurs ambulants. Casseroles, parures de draps, jouets et gadgets en tous genre trouvent leur place chez les camelots. Des churros sortis de l’huile exhalent leur parfum trop tentant de sucre vanillé, tandis que l’agua pé – boisson locale à base de vin – coule à flot dans le troquet voisin. Ici et là, un chef de rang invite les flâneurs à venir déguster les spécialités locales : soupe aux choux, morue braisée, et ce à toute heure de la journée ou de la nuit.
Soudain, un cavalier fend la foule, sorti comme par magie de l’une des propriétés aux murs blanchis à la chaux, renfermant pour la plupart une écurie et habitées durant cette seule semaine de l’année. Poussé par la curiosité, on s’aventure parfois dans ces cours où poussent bougainvillées et orangers : nul ne vous pose alors de questions ou ne vous fait rebrousser chemin. Au contraire, les propriétaires semblent plutôt fiers de susciter ces visites inopinées… La magie de Golegã opère, et le visiteur, cavalier ou non, devient à son tour acteur d’une fête unique et inoubliable !
La foire de Golegã rassemble plus de 5000 étalons, venus de toute la péninsule ibérique
De tous les éleveurs de pur-sang portugais, les plus prestigieux proposent leurs plus beaux étalons à la vente, dans un environnement parfois surprenant de luxe.
Le harnachement du cavalier n’est pas en reste, dans la plus pure tradition de l’équitation portugaise de travail : étriers-sabots somptueux, selles portugaises richement décorées, cuirs et accessoires viennent compléter avec bonheur le trajes portugues, la tenue traditionnelle des cavaliers.
C’est en 1885 que Bernardo Lima, dans son livre sur les races portugaises de chevaux, donna le nom de Lusitano pour les chevaux nés et élevés au Portugal. Le nom Lusitano vient de celui d’un peuple qui vivait dans l’ouest de la péninsule ibérique dans l’Antiquité. C’est en l’An 27 avant notre ère que les romains établirent la province de Lusitanie, entre les rivières Douro et Guardiana.
Issue de lignées ancestrales sélectionnées au fil des siècles, et soutenue par un peuple tout entier, la race lusitanienne n’existe pourtant officiellement que depuis 1967. Issus de tous les milieux sociaux, les cavaliers partagent une même passion, celle du cheval Lusitanien.
À toute heure, le cheval demeure omniprésent, peuplant les rues et animant les esprits : la magie de Golegã opère !
Galerie photos sur Golegã
Pour en savoir plus sur Golegã
La foire de Golegã se déroule chaque année durant la semaine du 11 novembre. Le programme et les dates sont visibles sur le site web officiel de la foire : https://feiradagolega.com/
Autres informations pratique :
- Assiociation Nationale du Tourisme Equestre (ANTE)
- 2150 Golegã – Tél : (00 351) 249 976 689.
- Office du Tourisme de Santarèm et du Ribatejo.
- Casa do campino. 2000-014 Santarèm – Tél : (00351)243 330 330
- Office du Tourisme à Lisbonne, bureau central.
C’est un superbe reportage…les images de fin d’après-midi baignent dans une ambiance dorée extrêmement chaleureuse. Bravo. Personnellement, je ferai un petit tri et mettrais moins de photos. Mais je pense que ton envie de partager tout ça et au maximum est le plus fort 😉
Merci
Disons que j’ai voulu au travers de cette large (pas tant que ça vu la quantité de photos que j’ai gardé !) sélection, montrer le plus de facettes possibles de ce rassemblement (qui je le rappelle, dure une semaine complète, avec un programme différent chaque jour au niveau des spectacles, sur lesquels j’ai fait l’impasse ou presque !!!)
C’est tout simplement superbe !
Beauté du cadre et des acteurs plus qualité des photos en font un reportage de haut niveau !
Merci Cédric.
Mais quelle merveille ce blogue !!! il n’y a que la sensibilité pour expliquer qu’un être puisse attrapper au travers d’un objectif de tels moments… merci.
Bonjour:
Je suis portuguais et je trouve ton reportage magnifique
des superbes images qui font chaud au coeur,je suis aussi photographe amateur et je vais bientôt publier un petit site sur internet sur la nature pour l’instant pas beaucoup de photos faute de temps en tout cas bravo pour ton site.