La photo naturaliste, communément appelée « chasse photo », fait appel aux mêmes techniques que la chasse à proprement parler : camouflage vestimentaire et olfactif, analyse comportementale, utilisation éventuelle d’appâts…
Le camouflage représente une partie essentielle du travail à réaliser pour une approche ou un affût efficace. De nombreux mammifères possèdent un odorat très largement supérieur à celui de l’homme, ce qui implique une grande « discrétion » au niveau des odeurs que le photographe répandra dans son environnement ! Voici quelques conseils pour éviter ou limiter la présence de votre odeur corporelle…
L’odorat chez les mammifères
À CONSULTER ÉGALEMENT : Pour en savoir plus sur le camouflage et les techniques d’approche…
De manière générale, nos grands mammifères et nos prédateurs possèdent un odorat très développé : le chevreuil par exemple, possède un odorat 100 fois supérieur au notre, soit approximativement l’efficacité de celui d’un chien. Inutile de préciser qu’une fois « éventé », le photographe est repérable par à peu près n’importe quel mammifère dans les minutes voire les secondes qui suivent, selon la vitesse du vent ! Un sanglier peut détecter une odeur humaine portée par la brise à plusieurs centaines de mètres…

Par grand vent, les mammifères rechignent généralement à sortir (je n’ai en tout cas que très rarement vu de chevreuils, de renards et de sangliers dans ces conditions !) ; l’idéal reste une brise légère, que vous pourrez détecter, et qui « accessoirement » pourra masquer légèrement les petits bruits que vous ferez en agitant la végétation environnante. La première chose essentielle à faire est donc de repérer le sens du vent, et de calculer son approche pour ne pas se faire éventer !
Une astuce consiste, pour éluder la direction d’une brise trop légère voire imperceptible, à utiliser un petit flacon pour pulvérisation nasale recyclé (ou au pire, un mouche-bébé) rempli de magnésie (à défaut de talc ou de farine, mais attention à l’humidité) : une simple soufflette en l’air vous indiquera immédiatement la direction où vous ne devrez pas aller 😉
Les chasseurs à l’arc utilisent une petite plume genre duvet pendue au bout d’un fil, qu’ils attachent à l’extrémité de leur arc… Idée transposable sur un appareil photo (merci à mon ami Jean-Jacques pour l’astuce !)
La dernière chose à prendre en considération est le fait que lorsque l’on passe, on laisse très souvent sa propre odeur (par les chaussures par exemple), qui peut alors être décelée plus d’une heure après notre passage par à peu près n’importe quel mammifère qui croisera notre chemin.
Ce qu’il faut éviter de faire !
Il n’y a pas de recettes miracles pour « passer inaperçu » au niveau olfactif dans la nature (hormis les affûts en caissons hermétiques avec aération par le toit, à plusieurs mètres de hauteur, comme c’est le cas sur certains affûts aux ours en Finlande, par exemple)
Néanmoins, le bon sens est de rigueur, aussi faut-il éviter avant sa séance photo :
- de fumer sa clope
- de s’asperger de déodorant parfumé, d’eau de toilette ou d’after-shave
- de faire un barbecue ou plus simplement, de faire la cuisine (odeurs de cuisson)
- d’aller faire son plein d’essence (odeurs très fortes sur les mains ou sous les semelles de chaussure)
- de faire une grosse séance de sport (sueur…)
- de faire un gros câlin à sa femme ou sa copine (ben oui, ça laisse des odeurs !)
Bien évidemment, toutes ces règles coulent de source ! Mais il arrive que l’on oublie certains petits détails, parfois, qui peuvent faire la différence !
Quelques astuces pour masquer vos odeurs
Il existe quelques astuces pour éviter de se « répandre » olfactivement parlant dans la nature. Ces petits astuces permettent uniquement de LIMITER les traces olfactives que l’on est susceptible de laisser sur notre passage.
Pour limiter son odeur corporelle :
- utiliser du savon sans parfum pour se laver (on en trouve facilement en pharmacie)
- laver ses vêtements camo (qui ne doivent être utilisés QUE pour vos sorties nature) avec ce savon sans parfum, ou à défaut avec une lessive neutre sans phosphates et pauvre en détergents bien évidemment (pour l’environnement… et pour bien d’autres raisons : certains mammifères distinguent les microparticules blanches laissées par certaines lessives sur le linge, à la manière d’une lampe à UV : dans la pénombre on ne verra que vous !)
- ne pas utiliser de sèche-linge, faire sécher ses vêtements naturellement (en évitant le jour où votre voisin fait un barbecue bien évidemment ! Expérience vécue…)
- pour votre haleine : pas de dentifrice « ultra mentholé », une pomme nettoiera votre bouche de toutes ses « odeurs » !
Pour limiter les traces olfactives laissées sur son passage :
- Toujours utiliser la même paire de chaussures (qui sera réservée à vos périples dans la nature)
- Entreposer vos vêtements de sortie nature par exemple dans une caisse dont le fond sera tapissé de végétaux prélevées dans le milieu dans lequel vous évoluez (sapins si forêt de conifères, chêne ou hêtre si forêt de feuillus, foin coupé… éviter de parfumer vos vêtements à la sève de pin s’il n’y en a pas dans votre milieu !!!)
- Si vous devez déposer des appâts destinés à des animaux au sens olfactif développé, si possible utilisez un grand bâton ou une perche pour le faire (de manière à ne pas laisser votre propre odeur sur le lieu même de dépôt)
- Détail pour les hommes : évitez d’uriner sur une surface dure quand vous portez vos vêtements et chaussures camo (essayez de le faire pieds et jambes nues, vous comprendrez vite pourquoi 😀 ) car il n’y a rien de tel que l’odeur d’urine humaine pour « marquer » votre passage !
L’astuce de la perche (ou du bâton) est aussi utilisée par certains pour laisser une « coulée » d’odeurs sur le sol, destinée à mener un prédateur charognard (renard ou autre) vers une carcasse qui aura été déposée à son intention. L’astuce consiste à « pendre » la carcasse (d’oiseau mort par exemple : on peut récupérer des cadavres le long des routes) au bout d’un filin lui-même pendu au bout de notre perche. On pourra donc traîner la carcasse au sol sur le lieu d’un passage habituel, pour que goupil puisse, lorsqu’il arrivera sur la traînée d’odeurs, suivre la piste jusqu’à votre affût mais sans tomber sur votre propre odeur 😉
ATTENTION : sauf erreur de ma part, les appats carnés sont INTERDITS en France (à confirmer) – Par ailleurs, les espèces protégées (allusion aux cadavres qui serviront d’appâts) ne peuvent pas être transportées, même mortes, sans autorisation spécifique sous peine de forte amende.
Les produits de masquage
Il en existe deux catégories de produits ou lotions destinées à « masquer » l’odeur humaine :
- ceux à base d’odeurs très fortes soi-disant destinées à « écraser » notre propre odeur : il s’agit généralement d’odeurs répulsives dérivées de certains animaux… Sans commentaires !!! L’effet ne peut être qu’inverse à celui escompté, car de toute façon il s’agira toujours d’odeurs que l’on ne trouve pas à l’état naturel dans notre environnement puisque généralement issues d’animaux que l’on ne retrouve pas dans nos contrées !
- ceux à base d’urines de femelles en chaleur (beurk…) pour « masquer » son odeur (produits à répandre généralement sous ses semelles de chaussures) : du fait qu’ils sont généralement fabriqués avec des phéromones de synthèse, je doute très sincèrement de leur efficacité !!!
Les tenues anti-odeurs
J’ai vu sur certains sites dédiés à la chasse à l’arc des tenues qui permettraient de camoufler l’odeur corporelle. Outre le fait qu’elles soient hors de prix (plusieurs centaines d’euros !), je doute sincèrement sur l’efficacité globale de ce genre d’artifice (camouflage réel, confort d’utilisation, imperrespirabilité…) – si quelqu’un a des infos à propos de ces tenues, ça m’intéresse (pas pour en acheter une, je tiens à le dire tout de suite !)
Préjugés sur le camouflage des odeurs
Il faut bien prendre conscience d’une chose : quoi que l’on fasse (hormis la solution des affûts hermétiques pour les ours décrite précédemment), il est IMPOSSIBLE de masquer son odeur corporelle dans l’atmosphère ! Donc quoi que l’on fasse, la seule règle essentielle est de faire attention au sens du vent.
Les efforts que l’on pourra apporter (solutions décrites ci-dessus) ne concerneront donc que des mesures destinées à ne pas amplifier le phénomène d’une part, mais surtout à limiter ses traces olfactives lors de son passage. Rien de plus ! Quoi que vous fassiez, vous restez un homme : l’un des êtres les plus malodorants du règne animal (paraît-il !)
Une technique particulière : l’accoutumance
Je terminerai ce petit topo sur le camouflage des odeurs par une technique disons… peu orthodoxe, que certains professionnels utilisent sur des sujets sensibles, et que d’autres ont pu parfois par hasard mettre en oeuvre, au fil du temps : l’accoutumance.
La technique consiste simplement, dans un environnement naturel donné, à diffuser de manière continue son odeur corporelle soit par présence journalière durant plusieurs mois, soit par apposition de vêtements « utilisés » à divers endroits (vieux tee-shirts avec lesquels on aura fait un peu d’activité physique par exemple !). Le but est d’accoutumer les animaux vivant ou passant dans ce milieu, à la présence de votre odeur 😉

Cela ne fonctionne pas toujours bien entendu, et cela demande un effort considérable puisque les actions d’accoutumance devront durer des semaines, voire des mois pour montrer leur efficacité ! Un inconvénient à cette méthode est le risque d’habituer certaines espèces chassées à l’odeur humaine : terriblement dangereux pour elles puisqu’elles pourraient être amenées à ne plus utiliser l’un de leurs sens les plus développés pour leur fuite : l’odorat !!! Donc à utiliser réellement avec parcimonie (personnellement je ne l’ai jamais mise en oeuvre…)
En bref
Pour résumer : rien ne sert de se parfumer, vous « puez » de toute façon pour nos mammifères sauvages !!! Essayez de limiter les odeurs typiquement « humaines » (tabac, parfum…), et de faire en sorte d’éviter de répandre votre odeur sur vos lieux de passage. Enfin, le vent : votre meilleur ennemi 😉
Si vous avez des remarques, n’hésitez pas (cet article est le premier d’une série qui va être consacrée au camouflage, sous toutes ses formes !)




