Il n’est pas rare sur les forums où je sévis, que les photographes (amateurs ou non) se plaignent du temps passé à traiter les fichiers RAW. Étrangement, du jour où je suis passé au « tout en RAW », j’ai gagné un temps incroyable sur ce que je passais devant l’écran à triturer mes photos !
Du coup, peut-être n’est-ce qu’une question de méthodologie ? Je vous propose un petit aperçu de ma façon de faire (logiciels utilisés : Canon DPP, Photoshop ; aujourd’hui il existe d’autres outils, mais pour ceux qui aiment DPP, la méthode est toujours valable !)
À CONSULTER ÉGALEMENT : Pour en savoir plus sur la retouche photo…
Les avantages et inconvénients du format RAW
Il convient avant toute chose de faire le point sur ce fameux format « brut », qui effraye tant les débutants par son apparente complexité. Et pourtant… Prenant la forme de fichiers « propriétaires » (.crw ou .cr2 chez Canon, .nef chez Nikon, .pef chez Pentax, etc…), le RAW offre d’énormes possibilités que ne peuvent fournir les fichier JPEG ou même TIFF 16 bits !
- Modification de l’exposition après coup (dans une certaines mesure)
- Modification de la balance des blancs totalement libre
- Optimisation de la granulation (bruit) et de la netteté (les « dérawtiseurs » offrent généralement des réglages plus performants que ce que peuvent fournir en direct les boîtiers)
- Meilleure dynamique
- Choix après coup de l’espace colorimétrique en sortie du fichier généré (couramment, Adobe RGB ou sRGB)
En réalité le format RAW est un « négatif numérique », qui offre aussi une autre particularité que j’apprécie par-dessus tout : il est non modifiable ! Impossible donc d’écraser malencontreusement une photographie durant son post-traitement 😉
Au titre des inconvénients, nous en citerons 3 essentiels :
- la taille des fichiers générés (par ex. sur Canon EOS 20D on divise par 2 le nombre de photos possibles sur une carte mémoire, à quelque chose près !) donc in extenso le stockage
- le format propriétaire (si la question de la compatibilité descendante ne se pose pas, celle de la nécessité d’avoir des logiciels sachant les exploiter, oui)
- le post-traitement obligatoire pour pouvoir utiliser les images
Ce dernier point pose beaucoup de soucis aux néophytes et beaucoup croient donc qu’il est nécessaire de passer des heures devant son écran pour ressortir le meilleur de ses images. Je ne partage pas cet avis ! Quand on shoote en JPEG, la quantité d’information dans l’image est très réduite par rapport au RAW, ce qui limite forcément les possibilités en post-traitement (optimisation, retouche…)
Gagner du temps dès la prise de vue…
Aussi bizarre que cela puisse paraître, il me semble primordial de penser à la prise de vue aux petits détails qui font la différence après ! Voici donc quelques « astuces » (peut-on appeler ça ainsi ?) que j’utilise pour grignoter un peu sur ce que je n’aurai plus à faire ensuite 😉
- En prise de vue extérieure, régler la balance des blancs à 5600°K : la raison est simple, les diapositives sont « étalonnées » à une valeur très proche, cela permet donc d’éviter de triturer cette fameuse balance des blancs ensuite, puisque le rendu sera quasiment celui que l’on aurait en diapo !
- Systématiquement vérifier l’histogramme au début d’une série de photos (faite en conditions identiques bien entendu) : ici aussi, de la logique. En vérifiant une éventuelle sous-exposition ou sur-exposition, on peut modifier AVANT sa série de prises de vues l’exposition (type de mesure, correction de l’exposition…) sur l’appareil de manière à éviter de fastidieux réglages après coup dans son « dérawtiseur »
- Faire le tri en suivant sur le boîtier pendant les moments calmes : que de temps gagné par la suite (temps passé à déverser ses photos sur l’ordinateur, temps passé à faire le tri…) ; il est facile et rapide de virer directement les flous manifestes et les cadrages ratés sur l’écran LCD du boîtier, si mauvais soit-il !
Premier tri grossier
La première étape (une fois les photos déchargées sur votre ordinateur) consiste à réaliser un premier tri, de manière grossière : on peut se contenter des JPEG basse qualité si l’on shoote en RAW+JPEG (dans ce cas, je conseille le « RAW+JPEG low », qui n’utilise qu’environ 10% de plus de la carte mémoire par rapport au format RAW seul, et est bien suffisant pour réaliser les tris et visualisations d’usage) ; en Canon (si on utilise le mode RAW seul) on peut faire cela avec Digital Photo Professionnal (dernière version en date lors de l’écriture de cet article : 2.1.1.4), qui présente trois avantages :
- sa gratuité (il est fourni avec les reflex numériques Canon, et peut se télécharger gratuitement sur le site du constructeur)
- sa rapidité globale (même s’il n’est pas vraiment ergonomique !)
- la qualité des fichiers générés en terme de piqué visuel et de colorimétrie (de LOIN le meilleur, en tout cas en photo de nature, où l’on rencontre fréquemment des textures « haute fréquence » comme les poils, les plumes, etc…)

Ce premier tri consiste à virer purement et simplement les images manifestement floues, ou avec des cadrages ratés (il arrive que le tri en direct sur le boîtier laisse passer des photos que l’on ne gardera pas…)
Sous DPP on peut appliquer aux images des marqueurs (activables avec la touche ALT + un chiffre compris entre 1 et 3) qui peuvent permettre par la suite de classifier ses images, par exemple par niveau de qualité. Personnellement je classe « 1 » les bonnes images, « 2 » les images correctes mais présentant des défauts et nécessitant une optimisation particulière (par ex. bonne netteté sans plus, ou horizon à redresser, ou léger recadrage nécessaire…), et « 3 » les images à jeter après vérification.
Une solution (celle préconisée par Canon dans son logiciel) consiste à utiliser l’outil de tri (sélectionner toutes les images du répertoire en cours avec CTRL+A puis lancer l’outil avec ALT+Q).

Le gros avantage de ce petit module est sa rapidité d’affichage (il est instantané !). Son gros défaut est que l’on ne peut pas afficher les images à 100% à l’écran (uniquement 50%) ce qui à mon sens peut dans certains cas précis occasionner une sélection un peu trop large ! Néanmoins pour une première passe il est rudement efficace et permet un travail rapide tout en apportant la possibilité de classer les images avec les 3 niveaux de marqueurs.
Lorsque j’ai peu d’images à trier, j’utilise directement l’outil de retouche par lots (voir ci-après), sinon je passe effectivement par l’outil de tri.
La retouche par lots dans DPP
La retouche par lots se fait sous DPP (toujours en ayant sélectionné toutes les images par CTRL+A) en appuyant sur CTRL+Flèche droite. On accède alors à un écran comportant la palette d’outils (voir D ci-dessous), mais permettant de passer rapidement d’une image à l’autre soit par le petit navigateur à gauche (voir C ci-dessous) soit en cliquant sur les boutons (image suivante / image précédente) de la barre d’outils (voir B ci-dessous).

Cet outil fonctionne exactement de la même façon que l’écran de réglage image par image : un double-clique sur l’image permet de basculer de la vue 100% / vue adaptée à la fenêtre (voir A ci-dessus).
Étapes de préparation d’une photographie (toutes les étapes sont optionnelles, bien sûr !) :
Dans l’onglet « Réglage de l’image RAW »
- Réglage du style d’im
age (pour bénéficier d’un peu plus de lattitude en terme de dynamique, choisir « neutre » ou « fidèle » – je conseille de régler le boîtier par défaut sur « neutre » s’il le permet… Concerne les EOS 5D et 30D) - Réglage de la balance des blancs (réglage conseillé sur le boîtier : 5600°K)
- Correction de l’exposition : si possible ne pas corriger plus d’un demi IL (0.5 diaphragme)
- Réglage de la netteté : de 1/10 à haute sensibilité à 4/10 à 100 ISO (sur les très bonnes images seulement ! Je conseille 1 ou 2/10 sur le boîtier)

Dans l’onglet « Réglage de l’image RVB »
- Réglage des niveaux : la dernière version de DPP propose un réglage « automatique » qui peut donner d’assez bons résultats (cliquer en A comme ci-dessous). Bien qu’il ne soit pas obligatoire de gérer cette étape dans le dérawtiseur (le réglage des seuils se fait après coup dans Photoshop), j’aime le faire tout de même lorsque je traite de grosses séries d’images et où je ne veux pas passer sur chaque image dans Photoshop (par exemple lors d’une diffusion d’images issues d’un reportage : hors de question de passer sur les 150 images à mettre en ligne pour le lendemain !!! Elles sont réglées dans les grandes lignes puis post-traitées telles que !)

Une fois toutes les images de la série « réglées », il suffit de lancer le traitement par lot (CTRL+B) en précisant le répertoire de destination des fichiers images. Personnellement je me contente (sauf préparation spécifique pour tirage ou utilisation particulière) du JPEG qualité maximale (10/10) en Adobe RGB. Afin de gagner du temps, je lance Photoshop en parallèle afin de commencer à traiter les premières images générées, pendant que les suivantes le sont par DPP en tâche de fond.
Conseils concernant les réglages par lot dans DPP :
- Dans le cas de séries d’images faites à même sensibilité, ou de qualité similaire, il est opportun de prérégler un certain nombre d’éléments, notamment la netteté (onglet RAW) : pour cela, régler la première image, puis faire clic de droite + « Copier la recette dans le presse-papier ». Puis sélectionner toutes les images (CTRL+A) et faire clic de droite + « Coller la recette dans une image sélectionnée » et valider.
- Avant de lancer le traitement par lots, il peut être opportun de sortir du répertoire (ou de l’outil) puis d’y retourner, afin de sauvegarder tous les réglages des images. En effet, en cas de plantage tous ces réglages seront perdus !!! Si votre PC est très stable et que vous avez confiance à 100%, ne le faites pas… Sinon, faites comme moi (il suffit d’une fois ! Expérience vécue…)
Optimisation des images sous Photoshop
Bien souvent, comme je le disais en préambule, on a tendance à passer des heures à triturer ses images… parfois pour un résultat final qui n’en vaut pas la peine ! Personnellement, sauf cas très particuliers je n’utilise que trois types d’outils :
– les niveaux (pour le resserrage des seuils)
– l’outil tons foncés/tons clairs (rarement, et par paresse car l’outil courbe fait la même chose)
– l’accentuation de la netteté (diverses méthodes, mais ce n’est pas l’objet du débat ici !)
Généralement je me limite à l’outil Niveaux. On y accède par CTRL+L (ou par le menu « Image / Réglages / Niveaux… ») et il se présente comme suit :

L’opération de resserrage des seuils consiste (pour faire simple) à « resserrer » visuellement, pour chaque canal colorimétrique (en mode RVB naturellement) ce que l’on appelle les points noirs et blancs. Dans la pratique, cela consiste à utiliser les petits curseurs sous les courbes de niveau et à les faire glisser jusqu’à arriver à une valeur ne générant pas de perte de valeurs colorimétriques dans l’image.

On fait cela pour chaque canal (Rouge, puis Vert, puis Bleu) de manière à faire disparaître le voile terne recouvrant éventuellement l’image, et pour faire remonter le contraste de manière douce et sans générer de « cramages » de hautes lumières ou « bouchage » d’ombres. Astuce très pratique (pas possible d’en faire une copie d’écran) : lorsque vous faites glisser les curseurs, appuyez sur la touche ALT, pour voir VISUELLEMENT les zones bouchées/cramées apparaître sur votre image !
Une fois cette courte opération effectuée, votre image est plus vive, plus contrastée mais sans pour autant avoir perdu d’informations au niveau des couleurs : l’avantage de cette méthode est qu’avec l’utilisation de la touche ALT, on peut régler une image sans utiliser un écran calibré (donc sans se fier à son oeil et faire des bêtises !) – à noter que dans beaucoup de cas on peut procéder directement sur les trois canaux en même temps (sans peaufiner pour chaque canal colorimétrique les réglages)
Résumé et conclusion
Finalement, le traitement d’images RAW peut se faire simplement quand on a bien assimilé les différentes étapes 😉 et permet de limiter le temps passé à triturer les fichiers images, car finalement, hormis le réglage des niveaux (par les seuils) le reste n’est que du facultatif !
Petit résumé :
- À la prise de vue : Balance des blancs à 5600°K, contrôle de l’histogramme, tri grossier sur le boîtier, si possible
- Premier tri avec DPP : utilisation de l’outil de tri spécifique (accessible par ALT+Q après avoir sélectionné toutes les images avec CTRL+A)
- Retouche par lot : CTRL+Flèche droite, puis réglages (facultatifs) dans l’ordre : balance des blancs, style, exposition, netteté, courbes
- Dérawtisation par lot : CTRL+B et lancement parallèle de Photoshop
- Sous Photoshop : réglage des niveaux de chaque image (pendant que les suivantes sont générées en tâche de fond)
Voilà ! Suite à ça on peut utiliser sous Photoshop divers scripts automatisés pour préparer les images pour le web, ou pour des tirages, etc… Tout est si simple finalement !!! En guise d’exemple « concret », lors d’un récent reportage sur un concours équestre, j’ai trié, post-traité, préparé et diffusé sur mon site web 120 images, le tout en 1h30 de temps (préparation des deux pages web et transfert des fichiers inclus !) : il suffit juste d’utiliser les bons outils et d’avoir la bonne organisation 🙂
À savoir : disposer d’un matériel suffisamment puissant permet de travailler avec une grande fluidité et de gagner du temps… D’où l’intérêt de bénéficier d’une quantité de mémoire RAM confortable dans ce type d’utilisation !



