Les moustiques : comme tout amateur de nature, le photographe animalier est confronté un jour ou l’autre à cotoyer ces salop… oups pardon, ces petits insectes volants piqueurs !
Présents notamment dans les milieux marécageux, les arthropodes pompeurs de sang peuvent parfois véhiculer des maladies ou provoquer des réactions cutanées assez désagréables. Petit aperçu des méthodes pour se protéger des moustiques…
Article mis à jour le 21/03/2022
À CONSULTER ÉGALEMENT : Pour en savoir plus sur le camouflage et les techniques d’approche…
- Pourquoi les moustiques piquent plus certaines personnes que d’autres ?…
- Pourquoi la piqure de moustiques démange ?
- Les « faux remèdes miracles »
- La première protection : des vêtements pour éviter les piqures
- Les substances réellement efficaces
- Chez soi : les pièges anti-moustiques
- Conseils d’utilisation et conclusion
Pourquoi les moustiques piquent plus certaines personnes que d’autres ?…
J’en ai souvent rigolé quand certains de mes amis se faisaient littéralement dévorer la nuit malgré les draps tandis que moi, peinard, je pouvais dormir en tenue d’Adam sans risquer la moindre rougeur…
En fait, l’explication est relativement simple, puisque les moustiques, comme bon nombre d’êtres vivants, réagissent à certaines substances chimiques, comme le dioxyde de carbone (CO²), la sueur (acide urique), l’acide lactique et bien d’autres choses sécrétées par le corps humain.
On sait notamment qu’un épiderme dont la sueur serait riche en acides gras (comme l’acide butyrique, aux relents ammoniaqués) serait propice aux piqûres répétées !

En d’autres termes, cela signifie que l’attirance de certaines personnes par rapport à d’autres pour ces petites bêtes peut varier jusqu’à un facteur 20 !!! Il faut aussi noter l’action des œstrogènes qui fait que de manière générale, les moustiques préfèreront les femmes aux hommes 😉
Il semble aussi que certains médicaments aient une action attirante sur les arthropodes piqueurs, notamment certains traitements contre le cholestérol ou les troubles cardio-vasculaires… Et il en serait de même pour quelques produits cosmétiques (décidément, les dames ne sont pas aidées !)
Pourquoi la piqure de moustiques démange ?
Il faut tout d’abord savoir que seule la femelle moustique pique. Ses besoins physiologiques impliquent la nécessité de trouver du sang pour mener à bien la gestation de ses oeufs ; pour cela, elle va donc pomper du sang là où elle en trouve !
Le fait de piquer l’épiderme humain ne génère pas en soi de douleur ou de démangeaisons ; c’est lorsqu’elle injecte sa salive (un puissant anti-coagulant qui neutralise les plaquettes pour que le sang reste liquide et puisse être plus aisément aspiré) que notre organisme réagit : les mastocytes, cellules spécialisées situées dans la couche inférieure du derme, sécrètent entre autres de l’histamine.
C’est lors de l’injection de sa salive, que le moustique peut communiquer certaines maladies à l’homme (chikungunia…)
Ce neuromédiateur, qui est aussi sécrété lors des réactions allergiques, est le principal responsable de la démangeaison et des rougeurs qui l’accompagnent ! La sensation de démangeaison débute dans la minute suivant la sécrétion histaminique, se poursuit durant 2 à 3 minutes, pour s’estomper environ 10 minutes après… Bien difficile de ne pas se gratter !
Une astuce pour éviter les démangeaisons qui fonctionne très bien, lorsque vous venez de vous faire piquer, est d’avoir un fumeur à votre portée : approchez doucement une cigarette (allumée, évidemment…) à proximité du bouton durant quelques secondes afin de chauffer la peau, et vous verrez que très rapidement, les démangeaisons disparaissent (fonctionne également sur les piqûres de guêpes et autres insectes…)
Les « faux remèdes miracles »
Il existe trois grandes arnaques relatives à la protection contre les moustiques : la citronnelle et autres plantes et huiles essentielles, les bracelets anti-moustiques, et les systèmes électroniques à ultrasons !
Citronnelle et plantes répulsives
La citronnelle et ses dérivés à base d’huiles essentielles sont en effet efficace sur quelques espèces d’arthropodes piqueurs… au détail près que cette efficacité dépasse rarement les 15 minutes. Ce qui limite grandement son intérêt… Autant vous dire que l’efficacité face à une horde de moustiques femelles assoiffées de sang est proche du néant !
Oubliez également les bougies et autres dispositifs à base de plantes : cela ne fonctionne pas sur les moustiques voraces. Quant aux géraniums, leur pouvoir répulsif est tellement anecdotique qu’il ne faut pas espérer en faire une barrière contre les insectes piqueurs.
Le seul dispositif qui fonctionne, ce sont les spirales anti-moustiques, que l’on met usuellement dehors le soir sous la table lors d’une soirée barbecue : elles contiennent notamment des pyréthrinoïdes, qui maintiennent à distance les moustiques assez efficacement. Mais ne vous y trompez pas : il faut rester à proximité immédiate pour être efficacement protégé. Et oubliez évidemment pour la photo sur le terrain, ou par jour de grand vent !
Les bracelets anti-moustiques
Plusieurs revendeurs m’ont proposé dans le passé de tester ces bracelets anti-moustiques, très usités chez les enfants (après 36 mois) et les personnes fragiles, du fait qu’ils utilisent usuellement des produits naturels ou faiblement dosés, et ne contiennent pas de DEET.

Il faut se rendre à l’évidence (et toutes les études corroborent mes propos) : leur efficacité est très discutable, dans la mesure où ils ne protègent que le membre où vous les portez ! Pour l’avoir expérimenté en milieu infesté : sur le terrain (par exemple dans une roselière), oubliez clairement !
De plus, leur intérêt en photo nature est réduit, à cause de leur couleur souvent voyante, et surtout des parfums (parfois peu agréables) qu’ils dégagent : pour le camouflage olfactif, on repassera !
Systèmes à ultrasons
Les systèmes à ultrasons, basés sur la génération de fréquences censées reproduire le battement d’ailes des moustiques mâles pour éloigner les femelles (en passant, on se demande pourquoi cela les éloignerait), sont de facto totalement inefficaces !
La démonstration est très simple : même au sein d’une même espèce, la fréquence sonore générée par le battement d’ailes varie selon la taille des individus ! De plus, cette fréquence varie fortement d’une espèce à une autre (ndlr : il y aurait plus de 300 espèces et sous-espèces de moustiques rien qu’en France)… ce qui tend à prouver l’inefficacité absolue de ce stratagème.
Accessoirement, un système générant des ultrasons pour approcher les animaux sauvages ne me semble pas vraiment une solution élégante… car eux, contrairement à nous pauvres humains, perçoivent les hautes fréquences !!!
On oubliera donc définitivement les applis mobiles antimoustiques, porte-clés et autres boîtiers ultrason : une pure perte de temps et d’argent.
La première protection : des vêtements pour éviter les piqures
La protection vestimentaire est la première barrière efficace contre les insectes piqueurs. En matière de photographie animalière, et ça tombe plutôt bien, la nécessité de camouflage fait que généralement le photographe est couvert de la tête aux pieds (souvent visage inclus s’il pratique la billebaude ou l’approche). Il faut néanmoins savoir que les moustiques ne sont pas sectaires, et peuvent parfaitement piquer au travers d’un jean’s !
Il faut donc éviter impérativement les vêtements collants ou moulants et préférer les tissus amples et relativement clairs (il est reconnu que les moustiques aiment le noir…) ; un pantalon de treillis, dont la coupe est souvent relativement large et la toile assez épaisse, fera généralement l’affaire pour les jambes.
Pour le haut du corps, je préconise (dans les coins « difficiles ») une veste « temps sec » doublée (généralement avec un filet) par-dessus un T-shirt à manches longues.
Pour la tête, la cagoule en filet s’avèrera très efficace, beaucoup plus que les cagoules en toile ! En effet, plus ample et plus rigide, elle évite aux petites bêtes d’atteindre la peau (exception faite pour les membres du clan des crânes rasés, dont je fais partie… lesquels pourront ajouter un bandana ou une casquette).

Le plus grand soucis vient généralement des mains : c’est toujours à cet endroit que je suis piqué lors de mes sorties, lorsque je ne prévois pas de lotion anti-moustique (sujet abordé ci-après). Et ce malgré la présence de gants ! L’utilisation de sous-gants en soie en plus des gants (utilisés généralement en hiver) peut partiellement remédier au phénomène, mais n’empêche pas quelques diptères récalcitrants d’opérer leur ponction sanguine.
Pour les mains et les parties sensibles du corps, le seul remède efficace s’avère la protection chimique !
Les substances réellement efficaces
Je ne ferai pas la liste exhaustive des substances protégeant de manière totalement efficace les personnes contre les piqures de moustique, mais me contenterai de parler de trois produits que j’ai moi-même testé (sur moi et ma famille 😉 de manière à être totalement exhaustif quant à leur efficacité !)

Le DEET
Sur le marché depuis plus de 50 ans, le Diethyl Toluamide (plus simplement appelé DEET) reste encore à l’heure actuelle l’une des plus efficaces. Relativement décrié du fait de nombreux cas recensés d’intolérances (et même de 2 décès suite à des utilisations massives !), ce composé synthétique présente la particularité de « manger » certaines matières plastiques et autres textiles synthétiques (bracelets de montres, lunettes, etc…).
À appliquer si possible sur la peau, son efficacité peut aller jusqu’à 10 heures après application, pour une solution en dilution de 50% (attention, la sueur ou la pluie réduisent son efficacité, ainsi que les frottements répétés avec les vêtements)
Passée cette petite présentation, je dois avouer qu’il montre une efficacité absolue contre à peu près toutes les espèces d’insectes piqueurs, quels qu’ils soient ! Il convient néanmoins de ne pas l’utiliser directement sur le visage (déjà testé sans conséquences, mais c’est contre-indiqué) ou sur les jeunes enfants étant donné son agressivité relative.
En vente libre en pharmacie avec des dilutions allant jusqu’à 50% de DEET, ce n’est pas un produit dangereux s’il est utilisé avec parcimonie (qu’on soient bien clairs !)
- Gras au toucher (donc pas vraiment agréable à étaler)
- Éviter absolument d’en mettre sur son matériel
- Réservé aux adultes
- Odeur assez forte de produit « chimique »
- Potentiellement dangereux (Jackson, D.; Luukinen, B.; Buhl, K.; Stone, D. 2008. DEET General Fact Sheet ; National Pesticide Information Center, Oregon State University Extension Services) !
- Efficacité probante sur tout type de peau (dosage à 25% ou plus)
- Réputé efficace contre les tiques, les puces et les aoutats
- Seul produit recommandé dans les zones sensibles (où il y a un risque de contracter des maladies : paludisme, dengue, chikungunya…)
L’ IR 3535
Substance un peu plus naturelle que le DEET, le 3535 (dont le doux nom savant est Ethyl Butylacetylaminopropionate) est moins réputé mais souvent aussi efficace… à priori sur certaines personnes (de nos essais personnels, le produit a semblé beaucoup moins probant que le DEET sur la gente féminine)
Commercialisé en dilutions allant jusqu’à 35% en spray, cette solution s’avère relativement agréable à l’usage car moins agressive que le DEET. Son odeur rappelle celle de la citronnelle (les produits commercialisés sont parfumés), et c’est la substance recommandée pour les femmes enceintes.
- Un peu « collant » mais pas gras (en tout cas bien plus agréable à utiliser que le DEET !…)
- Semble moins efficace sur certains types de peaux (dépendrait de la composition globale)
- Odeur proche d’une huile essentielle, plutôt légère et agréable
- N’a aucun effet sur les matières plastiques en cas de contact accidentel !
- Aucune contre-indication particulière (même s’il faut bien évidemment éviter de s’en mettre dans les yeux, car ça picote sévèrement ! J’ai testé pour vous…)
- Est réputé efficace contre les tiques, les taons, les guêpes et les abeilles !
L’icaridine
L’icaridine (appelé aussi 1-methylpropylester ou KBR 3023) est la substance qui fut utilisée lors des épidémies de chikungunia en 2006. Cette molécule réputée très efficace, possède tous les avantages du DEET (répulsion d’à peu près tous les arthropodes piqueurs existants) sans ses inconvénients.
Elle est commercialisée en dilution allant de 20 à 35% ; il semble cependant que la concentration affichée ne soit pas corrélée avec l’efficacité du produit : il faut donc tester idéalement les produits !
- Aucun ?… L’efficacité me semble excellente, sur toutes les personnes de mon entourage l’ayant testé
- Sans odeurs ou presque
- Ni gras ni collant
- N’attaque pas les plastiques
- Efficace contre à peu près tous les insectes nuisibles
Le Citriodiol
Le citriodiol (également appelé PMD) est un composé organique de type monoterpène, à l’odeur subtile de menthol et donnant une sensation de froid à l’application. Présent en petites quantités dans l’huile essentielle d’eucalyptus citronné (Corymbia citriodora), il est raffiné afin d’augmenter sa concentration en particules actives, et demeure à ce jour le seul répulsif à insectes naturel, reconnu en Europe et aux USA.
On le trouve dans les substances répulsives à la fois sous le nom de citriodiol, mais aussi d’huile essentielle d’eucalyptus citronné. Son efficacité semble variable, mais est en réalité liée à la qualité des composants utilisés. Une étude a notamment démontré que les molécules de synthèse étaient beaucoup moins efficaces que les huiles naturelles raffinées (Scott P. Carroll et Jenella Loye, « PMD, a Registered Botanical Mosquito Repellent with Deet-Like Efficacy », Journal of the American Mosquito Control Association, vol. 22, no 3, 2006, p. 507–13)
- Produit moins efficace si basé sur des molécules de synthèse
- Légère odeur de menthol, nuisant au camouflage olfactif
- 100% naturel
- Aussi efficace que le DEET
- Sensation de fraîcheur à l’application
- N’attaque pas les plastiques
Pour les vêtements, la Permethrine
Les traitements à base de Permethrine ne sont pas destinés à être utilisés sur la peau, mais sur les vêtements. Il faut dire que cette substance n’est pas un répulsif, mais un insecticide (de la famille des pyréthrinoïde), ce qui explique son efficacité. Son efficacité est annoncée pour durer jusqu’à 2 mois (même après 5 lavages à 40°C) et être inodore après séchage sur les vêtements (ce dernier point est discutable !!!)
Je l’utilise depuis des années, avec assez de succès je dois l’avouer (finies les piqûres sur les mains au travers des gants !)
- Nécessite de se couvrir de la tête aux pieds (donc très bien adapté aux photographes animaliers, mais pas aux promeneurs qui ne se baladent jamais avec une cagoule et des gants !!!) ou à défaut, d’être utilisé avec un répulsif classique pour les zones exposées du corps ;
- L’odeur, susceptible d’être détectée par la faune sauvage (ce produit n’est pas réellement inodore même si une fois sec, il faut coller le nez dessus pour le sentir !)
- Évite de se badigeonner la peau
- Durabilité
- Insensibilité à la pluie et la sueur
- Protection excellente contre les tiques !
Chez soi : les pièges anti-moustiques
Bien qu’ils soient évidemment inutilisables sur le terrain (certains doivent être branchés sur secteur), on peut imaginer employer des pièges anti-moustiques chez soi, pour celles et ceux ayant un jardin et réalisant des photos chez eux.
Tous ne sont pas efficaces à 100%, mais ils demeurent d’excellents moyens de tenir éloignés les moustiques de leurs proies potentielles. Ils utilisent pour cela divers stratagèmes : émission de CO², mélange odorant, octénol (alcool de champignon dont raffolent les insectes piqueurs), lampe UV…
Les meilleurs modèles utilisent plusieurs de ces techniques simultanément, et permettent de piéger rapidement les moustiques environnants avec une efficacité pouvant approcher les 90% (tests réalisés par UFC QueChoisir, 06/2019).
Pour une efficacité maximale, il faut juste bien veiller à ne pas disposer les pièges trop près de vous, car les moustiques ne feront pas la différence, et iront à la cible la plus proche !
Conseils d’utilisation et conclusion
Je ne vais pas réinventer la poudre, en conseillant d’utiliser des vêtements amples pour le corps et les jambes (mais évidemment silencieux et camouflés !) ; pour les jours de grande chaleur, l’utilisation de répulsif corporel pourra se faire sous des vêtements fins (voire en plus avec du répulsif spécial vêtements).

Au niveau du choix des produits, j’aurai tendance à conseiller l’utilisation d’un répulsif à base de Citriodiol ou d’Icaridine, couplé à de la perméthrine pour les vêtements, pour leur côté pratique et leur efficacité.
Pour le photographe animalier, voici les bonnes pratiques pour se protéger efficacement des moustiques :
- Pour les jambes : utiliser du répulsif vêtements des chevilles jusqu’aux genoux de manière à éviter les tiques (d’une pierre deux coups !) ; on pourra aussi en mettre sur les chaussures (toujours pour les tiques)
- Pour les mains : préférer le répulsif vêtements sur les gants (je déteste personnellement m’enduire les mains de produits collants ou gras…) – dans les zones très difficiles, genre marécages, on pourra mettre en plus du répulsif sur le dos de la main et les poignets (parfois découverts momentanément lorsqu’on tend un bras), voire comme c’est pratiqué en Alaska par les chasseurs, littéralement se scotcher les manches !
- Pour la tête : répulsif à vêtements sur la cagoule ou le couvre-chef utilisé, plus répulsif sur le visage et dans le cou (voire dans les cheveux si comme moi, ils mesurent 2mm la plupart du temps !)
- Si vous êtes « seulement » en randonnée ou en promenade : répulsif corporel adapté (enfant ou adulte) sur les zones dénudées, à renouveler toutes les 6 heures environ (voire toutes les 2/3 heures si vous suez beaucoup !)
Il ne faut pas négliger la protection contre les petites bêtes, qui peuvent parfois s’avérer fort dangereuses, et pas seulement dans les pays exotiques (la maladie de Lyme, véhiculée par les tiques, en est le meilleur exemple…). Pour information, ces produits coûtent entre 6 et 15 € le flacon… Donc, protégez-vous !



